Publié le 9 Décembre 2012

Gravelotte

Le cimetière de Saint-Privas (bataille de Gravelotte) par Alphonse de Neuville.

 

Madame Jeanine Laurent, présidente du Comité de Levallois-Perret du Souvenir Français, nous a adressé un souvenir familial. Il s’agit d’une lettre de l’un de ses aïeux, alors en pleine guerre franco-prussienne.

 

« Vierzon, le 10 octobre 1870,

Mes chers parents,

Nous avons quitté Troyes samedi à 9 heures du soir pour venir à Vierzon. Nous sommes venus avec des échappés de Sedan qui nous ont raconté beaucoup de choses en nous disant qu’à la bataille du 16 août à Gravelotte, ils ont été fameusement trahis ainsi qu’à Sedan. On leur disait quand ils voyaient l’ennemi de ne pas tirer, car ce n’étaient que des Français.

A Sedan, quand le brave cochon de Napoléon leur a fait signer la capitulation, sur quatre mille officiers, il y en a eu cinq cents pour la signer et 3.500 qui voulaient résister, mais ils ont été vendus. Ils ont brisé leurs armes, tous, en disant qu’ils ne s’en serviraient pas. C’était misérable de les entendre parler et ils disaient que nous serions pris.

Cher père, je vous dis que nous sommes à Vierzon, mais je ne sais pas pour combien de temps. On nous parle de nous armer de Chassepot et que nous irons à Tours, en Touraine, ou à Epinal, dans les Vosges. Mais nous ne savons rien. Je préférerais moi aller à Tours ou est le gouvernement. Nous serions mieux là que partout ailleurs. Je ne peux rien dire de certain. Je vous dis qu’à Vierzon, il y a beaucoup de troupes. Je ne sais pas combien, mais il en défile toujours et la gare est toujours encombrée. Ce matin, il est arrivé un groupe de soldats avec un train d’artillerie, leurs pièces et leurs munitions.

Dans la dernière lettre que vous m’avez envoyée, vous m’avez dit de me remplacer. J’ai cherché et j’ai trouvé, mais je n’en veux pas car on me demande 3.000 francs. Et il faut que le commandant le veuille. Maintenant, s’il fallait la permission des chefs, je crois que je l’aurais. Je crois que c’est comme on dit : le capitaine, Monsieur Jules Foulhouse, que ce ne serait pas pour prendre mon argent et me laisserait embarrassé. Si vous le faites, cela serait mieux dans le département du Puy de Dôme que partout ailleurs. Prenez bien vos précautions. Mais je ne vous le conseille pas. Ainsi, faites comme vous voudrez. Parlez-en à du monde qui en connait davantage que vous.

Si vous m’écrivez, mon adresse est au 32ème régiment de marche 3ème bataillon 7ème compagnie (comme je vous l’ai déjà dit), à Vierzon ou à la suite de mon bataillon.

Je vous envoie mon portrait. Veuillez bien le recevoir.

Votre aimable fils,

Mathieu ».

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