Publié le 20 Janvier 2017

Quatre minutes d'émotion et de fierté.

Le samedi 14 janvier une importante cérémonie s’est déroulée dans le grand salon d’honneur de l’Hôtel de ville de Paris. En effet, la fédération nationale André Maginot organisait le 23ème prix de la Mémoire et du civisme. A cette occasion j’ai pu, en présence de nombreuses personnalités dont notre président général, remettre le drapeau des cadets de Rhin et Danube à la garde des élèves de l’institution Jeanne d’Arc de Colombes.

Sans nul doute cette courte séquence marquée par des symboles forts mais aussi par la fierté et l’émotion a contribué à renforcer le lien entre générations, à raviver la mémoire et à donner du corps à notre devise « à nous le souvenir, à eux l’immortalité ».

Par ailleurs, ces élèves se sont vu remettre le prix du Centenaire pour leurs travaux sur les sites de la Somme.

Claude Guy,

Délégué général du Souvenir français pour les Hauts de Seine.

Quatre minutes d'émotion et de fierté.

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Publié le 19 Janvier 2017

Roland Glavany, mon général.

Voilà une année qui commence bien mal. A quelques jours d’intervalle, Madame Glavany a rendu son âme à Dieu suivie de son époux le général de corps aérien, Grand’ Croix de la Légion d’honneur, Roland Glavany.

Roland Glavany était président d’honneur du Comité d’Issy-Vanves du Souvenir Français. Il faudrait des pages et des pages pour raconter ce que fut sa vie. Cela a d’ailleurs fait l’objet d’un livre en juin 2013 : « Du Bataillon de choc au Mirage », en collaboration avec Bernard Bombeau, aux Editions Pierre de Taillac. Mais deux mots me viennent à l’instant pour définir le général Glavany : fidélité et amour.

Fidélité à la France quand alors élève de l’Ecole de l’Air, il décide de s’engager dans les Forces Françaises Libres, en passant par l’Espagne : « En 1943, comme des dizaines de milliers d’autres, j’ai traversé les Pyrénées puis l’Espagne. Il n’y avait que deux conditions ; d’abord, savoir marcher en montant ; cause : les Pyrénées ; la seconde : ne pas se faire piquer par les Allemands ; cause : l’Occupation ».

Roland Glavany débarque en Afrique du Nord. On lui explique que s’il veut continuer sa formation de pilote de chasse aux Etats-Unis, il lui faut attendre plus d’une année : « Pas question. J’ai demandé une unité para. Et c’est ainsi que j’ai atterri à Staouéli, à l’ouest d’Alger, au Bataillon de Choc du cher commandant Fernand Gambiez. Mais, manque de chance, ledit Bataillon venait de terminer son stage de transformation parachutiste. Et voilà pourquoi de fil en aiguille, à la tête de la 3ème section de la 3ème compagnie (les meilleurs…), j’ai « fait » trois débarquements en petits bateaux (LCI ou LCA) : la Corse en 1943 ; l’Ile d’Elbe et la Provence en 1944. »

Il sera blessé à trois reprises. D’abord en Corse où il débarque avec le bataillon en septembre 1943. Son métier : celui de commando, avec des actions de renseignement, des coups de mains contre les Allemands, et des missions de destruction avec son arme favorite : la grenade ! Blessé sérieusement, avec de nombreuses fractures, il est remis sur pied pour être à nouveau blessé – justement au pied – lors du débarquement de Provence sur les pentes du Mont Faron. Plus tard, le 10 septembre, avec le Choc, à l’entrée de Dijon, il tombe sur une mitrailleuse allemande : il est à nouveau touché, cette fois à la jambe.

Fidélité au chef, le général Giraud qui avait réunit les forces et moyens navals pour libérer la Corse : « Un des chefs militaires de la Résistance, le commandant Colonna d’Istria, put faire appel au général Giraud pour demander son appui. Celui-ci se tourna forcément vers le commandement allié en Méditerranée, lequel, en pleine organisation de la libération de l’Italie, lui fit comprendre qu’il fallait qu’il se débrouillât seul. Ce qu’il fit ». Soixante-dix ans plus tard, il disait encore : « De Gaulle, de Gaulle, oui bien sûr ! Mais n’oublions pas les actions extraordinaires du général Giraud, qui était unanimement apprécié chez nous ! ». Fidélité à ses camarades morts pour la France en Corse, comme l’adjudant-chef Richard de Préaudet : « Je n’oublie pas que sur ces routes de Corse, 300 d’entre-nous sont morts. Pour la France ».

Une fois la guerre terminée, Roland Glavany renoue avec l’armée de l’Air. Il termine enfin sa formation de pilote sur un P-51 de reconnaissance. Mais, comme l’écrit si bien Jean-Dominique Merchet, dans L’Opinion, « quelque chose est cassé ». Il décide d’intégrer l’école d’ingénieurs SupAéro et devient pilote d’essais au Centre d’essais en vol puis chez Dassault, où il se lie d’amitié avec Serge. Roland Glavany sera alors pilote d’essais de la famille des Mirages (Mirage III et Mirage IV). En 1958, il est le premier pilote à franchir Mach 2 en Europe. Pourtant, il verra encore des drames, comme ceux de ses camarades qui se tuent lors de ces fameux vols d’essais, tel Claude Dellys en 1952 ; Claude qui avait été son instructeur.

Fidélité de nouveau à ses compagnons d’armes. En 1959, il réintègre l’armée de l’Air et est nommé au sein de la 10e Division parachutiste du général Gracieux, chef du Poste de Commandement Aérien Mobile. « C’était un grand honneur. Nous devions obtenir des renseignements et diriger les appuis-feu aériens nécessaires aux régiments engagés. Le patron était le général Gracieux. Petit, râblé, d’un calme imperturbable, précis et concis dans ses ordres, d’une bonhomie apparente que démentait très vite un regard sans équivoque, le général Gracieux vivait pour sa division qu’il avait parfaitement en mains », dira-t-il.

Il voit au cœur des unités paras l’état d’esprit qui dérive. Tentation de suivre les généraux ? Certainement pas : « Totalement intégré à cette division parachutiste dont j’étais solidaire, je restais néanmoins un aviateur et gardais ma liberté d’esprit et de jugement. Si je n’étais pas lassé des combats – car l’allégresse des combats, cela existe – je voyais avec consternation ce beau pays peu à peu crucifié tandis que l’amertume des officiers montait tout autour de moi devant une politique qu’ils ne comprenaient point ».

Par la suite, Roland Glavany poursuivra sa carrière au sein de l’armée de l’Air, jusqu’en 1978 – avec les galons de général de corps aérien- après avoir commandé le CEAM (Centre d’Expériences Aériennes Militaires), la base de Mont-de-Marsan et les Ecoles de l’armée de l’Air.

Un regret ? Avoir tant et tant côtoyé les parachutistes sans en avoir le brevet : « Voilà pourquoi, ayant acquis avec mes étoiles de brigadier une plus grande liberté d’action, j’ai demandé à sauter vers 1975. Compte-tenu de mes blessures aux jambes, les toubibs dirent « au fou », jusqu’à ce que, lassé, un chef-toubib finit par déclarer : « Il veut sauter ? Qu’il saute ! ». Ce que je fis. Je le fis naturellement avec mes camarades des Commandos de l’Air, à Nîmes (salut au capitaine Ciappa). Nous sautions à partir d’un « Broussard » et j’aimais beaucoup cela, être assis par terre, les jambes à l’air avant de se balancer. Aussi, un jour de 1977, je participai à Avignon à un rassemblement para, devant le Chef d’état-major de l’Armée de l’Air de l’époque, le général Maurice Saint-Cricq, mon ami. Seulement voilà, à l’arrivée au sol, je sentis et entendis un « crac », à droite. Disons-le tout de suite, c’était la « bi-malléolaire » (sous-entendu la fracture) et deux mois de plâtre. Et mon chef vénéré vint alors vers moi : « Je te l’avais bien dit que tu jouais au c.. ». Et comme l’a dit un autre général, jaloux : « Ces trucs-là, faut les réussir ou s’abstenir ». Quel dommage. C’était le 4ème saut, pas le 5ème, qui lui m’aurait permis d’avoir droit à la plaque souvenir. C’est alors que je me suis rappelé m’être éjecté d’un Mystère IV en vrille que je ne parvenais pas à arrêter. J’étais pilote d’essais chez Monsieur Marcel Dassault, avant les « Mirages » et toute la série. C’était vingt ans avant, en 1955. J’ai dit cela à mes camarades de l’Armée de Terre : « 4 + 1 : ça fait 5 ! ». Ils ont condescendu à l’admettre. Et c’est ainsi que l’insigne de parachutiste est aujourd’hui en bonne place dans ma bibliothèque ».

Alors qu’il est à la retraite depuis quelques semaines (« J’avais entrepris des travaux dans la maison de campagne, mais je n’ai jamais été un grand bricoleur »), il est rappelé pour prendre la direction de l’Office Français d’Exportation des Matériels Aéronautiques.

Fidélité enfin en œuvrant pour les associations du Souvenir Français, des Ailes Brisées, dont il devient président, ou du Tomato Club. Fidélité aux camarades du débarquement de Provence en prenant la présidence de l’association Rhin et Danube. A un Résistant qui voulait lui apprendre d’où venait le général de Lattre de Tassigny, il avait répondu : « Tu sais – il tutoyait tout le monde et c’était bien souvent une marque d’affection – quand tu auras fait autant de cérémonies que moi à Mouilleron-en-Pareds, on en reparlera ! ».

Amour est le second mot qui me vient à l’esprit quand je pense au général Glavany. D’abord l’amour de la famille. Dans ses interviews, dans son ouvrage, il n’est pas un chapitre où le général n’évoque pas sa famille et le bonheur familial. Lors d’une réunion de notre Comité, il m’avait un jour indiqué : « Dans tout ce que tu fais, n’oublie jamais ta famille. Elle doit être la priorité. C’est important ».

Amour de son prochain. Esaïe 58 :7,8 41 : « N’est-ce pas que tu partages ton pain avec celui qui a faim, et que tu fasses entrer dans la maison les affligés qui errent sans asile ? Quand tu vois un homme nu, que tu le couvres, et que tu ne caches pas à ta propre chair ? ». L’amour de son prochain, le général Glavany l’a montré et démontré à maintes reprises. Ainsi, il fut l’un des piliers du Café 115, comme notre adhérente Louise Zazzera, géré par l’Association pour le Logement des Personnes Isolées Résidant à Issy-les-Moulineaux (Alpirim), sous la houlette de notre ami Marie-Auguste Gouzel, et cofinancé par la ville et la DRIHL 92. Ce Café permettant aux personnes sans abri de bénéficier d’un accueil, d’une orientation et/ou d’un accompagnement.

Amour de la littérature et des belles lettres. Pour son quatre-vingt-dixième anniversaire, nous lui avions offert une ancienne et très belle édition des Confessions d’un enfant du siècle, d’Alfred de Musset. Et voilà notre général nous remerciant en nous citant, par cœur, le premier chapitre dudit livre !

Amour de son épouse enfin. Quelle plus belle preuve d’amour que ne pas pouvoir survivre à la disparition de son épouse… Ce jeudi 19 janvier, l’on procède aux enterrements de Madame Glavany et de son mari dans le cimetière municipal d’Issy-les-Moulineaux. Bien triste journée.

 

CDT (RC) Frédéric Rignault

Président du Souvenir Français d’Issy-Vanves

Délégué général adjoint pour les Hauts-de-Seine.

 

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Publié le 15 Janvier 2017

Troupes françaises en retraite vers la frontière chinoise (Copyright Wikipédia).

Troupes françaises en retraite vers la frontière chinoise (Copyright Wikipédia).

Situation du Japon en janvier 1945.

 

Janvier 1945. La situation du Japon n’est pas des plus favorables… Les Américains, après avoir reconquit les îles Mariannes, sont maintenant en train de reprendre les Philippines aux Japonais. Ils lancent également leurs avions bombarder le sud de l’Indochine, et notamment Saigon.

 

De leur côté, les Anglais envoient des parachutistes au Tonkin dans le but de désorganiser les postes japonais. Parmi ces soldats de l’Empire britannique, se trouvent des Français représentant le Gouvernement provisoire de la République (entre autres la Force 136) ; prélude à une force d’expédition française qui prévoit près de 60.000 hommes. Le général Blaizot est d’ailleurs envoyé à Ceylan, dans le but de discuter des modalités avec Lord Mountbatten.

 

Les îles japonaises, elles-mêmes, font l’objet de raids de la part de l’aviation américaine.

 

La situation agricole n’est pas favorable non plus. Les bombardements, l’économie de guerre qui désoriente les forces vives vers l’effort militaire, tout cela entraîne de mauvaises récoltes et des révoltes de la faim. Plusieurs milliers de Vietnamiens se trouvent en état de sous-nutrition. Les Japonais d’Indochine sont persuadés que les Alliés préparent un débarquement d’ampleur. Ils ont laissé en place une administration française, favorable au régime de Vichy, donc pro-allemande. Nos soldats sont répartis dans des casernes installées partout sur le territoire indochinois. Mais ils sont peu nombreux : à peine 12.000 hommes, appuyés de 60.000 soldats « autochtones ».

 

Les Japonais ne sont pas vraiment plus nombreux : à peine 50.000 soldats. Il est temps pour eux d’intervenir s’ils ne veulent pas être débordés. L’Opération Mei est décidée.

 

L’Opération Mei.

 

Elle est d’autant plus décidée que l’aviation américaine fait bombarder Tokyo par 300 B-29, faisant en deux jours, près de 100.000 victimes.

 

Dans les premiers jours de mars 1945, les troupes japonaises sont déployées autour des garnisons françaises. Le 9 mars au soir, l’amiral Decoux, gouverneur général de l’Indochine reçoit l’ambassadeur japonais Matsumoto pour une réunion de routine. A 19 heures, l’ambassadeur présente un ultimatum exigeant que les troupes françaises passent immédiatement sous commandement japonais. Decoux essaie de gagner du temps, mais les premiers coups de feu éclatent dans Saigon. L’Opération Mei est déclenchée. A 21 heures, les garnisons françaises, Decoux et ses adjoints sont mis aux arrêts. Entre 20 heures et 21 heures, les garnisons françaises sont attaquées par surprise par l’armée impériale japonaise. Plusieurs officiers administrateurs et officiers français sont exécutés : à Lang Son, le colonel Robert et le résident Auphelle, invités à dîner ce soir-là par leurs homologues japonais, sont arrêtés par surprise et décapités à coup de sabre, de même que le général Lemonnier qui refusait de donner l’ordre de capituler. A Thak Khek, l’administrateur Colin et l’inspecteur Grethen sont également tués. A Dong Dang, le commandant Soulié est tué après avoir repoussé trois assauts ; le capitaine Anosse, qui a pris le commandement de la contre-attaque, tient trois jours et trois nuits mais doit cesser le feu également à court de munitions et sa garnison décimée. Les Japonais l’honorent de cet exploit puis le massacrent aussitôt ainsi que 400 prisonniers. A Hanoi, marsouins et tirailleurs de la citadelle tiennent vingt heures à un contre dix, menés par le capitaine Omessa, et repoussent trois assauts dont le dernier est qualifié de fait d’armes, mais qui finit par lâcher à court de munitions. Toujours à Hanoi, le capitaine Regnier est torturé et massacré pour avoir refusé la reddition. Son adjoint, le lieutenant Damez, repousse pendant quatre-vingt-dix heures les Japonais en leur occasionnant de lourdes pertes et finit par s’enfuir en forçant les lignes japonaises, après avoir incendié le poste. Au quartier Balny, le lieutenant Roudier tient jusqu’à l’aube. On relève particulièrement le fait d’armes de la vingtaine d’hommes, artilleurs, et leurs trois sous-officiers, retranchés dans « La Légation ». A Hué, le capitaine Bernard et le lieutenant Hamel résistent toute la nuit contre trois compagnies de Japonais équipés de blindés et d’artillerie. Le capitaine Bernard, blessé, est fait prisonnier et sera miraculeusement épargné. Il passera, comme des milliers de soldats et de civils français, le reste de la guerre en camp de concentration, sous le commandement japonais, puis Vietminh.

 

Sur les 34.000 Français métropolitains présents dans la région, plus 12.000 militaires d’origine métropolitaine, plus de 3.000 sont tués en moins de 48 heures. L’administration coloniale est détruite de fait. Les postes militaires français à travers tout l’Indochine (Annam, Tonkin, Cochinchine, Laos, Cambodge) sont touchés. Les troupes japonaises prennent notamment les citadelles d’Hanoi et de Lang Son et y massacrent les Européens et les troupes annamites, malgré les promesses faites en cas de reddition. Des camps de prisonniers sont créés pour y parquer civils et militaires. A Hanoi, les généraux Mordant et Georges Aymé commandent la résistance, mais celle-ci doit finalement capituler au bout de quelques heures.

 

Au Tonkin, le général Sabattier, méfiant, a transféré peu avant le coup de force son poste de commandement hors d’Hanoi, tout en mettant en garde son subordonné le général Alessandri. Tous deux dirigent une résistance de quelques milliers d’hommes. Une partie des troupes françaises est faite prisonnière, tandis que d’autres « prennent le maquis ». Les groupes français, dont la tête de chaque soldat est mise à prix, baptisés plus tard « colonne Alessandri », parviennent en Chine, où ils se mettent à la disposition de la Mission militaire française.

 

 

Fernand Cron.

 

Fernand Cron est téléphoniste au sein de la garnison de Dong Dang. Prisonnier, il est conduit comme beaucoup de ses compagnons d’armes, ainsi que des Annamites présents dans le camp, dans un entrepôt des douanes.

 

Georges Fleury, dans son ouvrage La guerre en Indochine, a raconté l’aventure de Fernand Cron : « A la nuit tombée, les Japonais font irruption dans le magasin. Ils obligent les prisonniers à se dénuder, même les femmes. Ils les entravent et les poussent à coups de crosse vers la route de Lang-Son.

 

Parvenus près de la mission japonaise, les prisonniers sont obligés de s’agenouiller au-dessus d’une fosse d’où s’évade la lourde puanteur des eaux sales de Dong Dang. Des porteurs de torches éclairent la scène. Des Japonais dégainent leurs sabres. Un ordre domine tous les bruits de la nuit. Les lames s’abattent dans des bruits mats. Des têtes tombent dans la fosse, toute de suite rejointes par des corps d’où jaillissent des flots de sang. Des bourreaux ont manqué leur coup. D’horribles plaintes montent de la tranchée. Les maladroits sautent dans le cloaque pour achever leurs victimes.

 

Un deuxième alignement de condamnés bascule dans le noir. Puis un troisième se met en place. Fernand Cron devance le coup de sabre d’une fraction de seconde. Il plonge sur le corps des suppliciés. La lame l’a entaillé de biais à hauteur des vertèbres cervicales. Derrière Cron, le soldat Bravaqui s’écroule en hurlant « Vive la France ! ». Comme il répète son cri de bravade, l’homme qui l’a sabré se laisse tomber sur lui pour terminer la besogne. Cron reçoit encore quelques corps mais contient à chaque choc ses cris de douleur.

 

Une fois le dernier condamné exécuté, les assassins descendent tous dans la fosse et lardent de coups de baïonnettes les corps emmêlés. Epargné, Fernand Cron décide de laisser passer du temps après le départ des brutes. Le sang de ses compagnons ruisselle sur lui. La large plaie de son cou irradie d’intolérable douleur chaque fois qu’il respire. Au bout de quelques temps, le miraculé s’enhardit à appeler un par un ses compagnons. Personne ne lui répond. Il est seul parmi le magma de chair, de boue et de sang dont il s’extirpe au prix d’efforts surhumains.

 

Le blessé à demi étêté rampe dans un boyau fétide, se redresse, tâte sou cou où il découvre une plaie large comme la main, reconnaît une piste menant à la montagne, rassemble ses dernières forces, prend sa tête à deux mains, la maintient bien droite et se lance à la course. Derrière lui, Dong Dang flambe. Cron court sans lâcher sa tête jusqu’à ce qu’il bute contre deux Tonkinois échappés du fort. L’un d’eux a le dos troué par deux coups de baïonnette. L’autre est indemne. Le trio parcourt encore cinq kilomètres et pénètre dans un village habité par des Thôs. Cron est à bout de forces. Ses bras mordus de crampes ne peuvent plus maintenir sa tête. Son menton tape sur sa poitrine étroite. Le tirailleur indemne s’aperçoit soudain de son état. Il pousse un cri d’horreur et s’enfuit à toutes jambes.

 

Fernand Cron perd conscience sitôt que des montagnards l’allongent sur un bat-flanc. Lorsqu’il émerge de sa torpeur douloureuse, il est lavé, vêtu à la tonkinoise, sou cou est pris dans une pâte brune. Les montagnards décident de le cacher dans une grotte avec son compagnon.

 

Quelques jours plus tard, alors que quelques défenseurs de Lang Son errent encore dans les montagnes calcaires proches de la frontière, le capitaine Michel, qui a échappé avec certains de ses hommes du 3e RTT, repère un paysan vietnamien. Il est tout petit, penché sur bâton de marche. Ce dernier suit les soldats français depuis quelques centaines de mètres. Sur leurs gardes, les hommes de Michel le laissent approcher. Le capitaine se rend compte qu’il est européen. Fernand Cron a les larmes aux yeux. Il parle difficilement et ne peut redresser sa tête penchée sur sa poitrine. Il se met à genoux devant Michel, place ses mains derrière son dos et, en articulant difficilement, répète à plusieurs reprises :

 

  • C’est comme ça qu’ils m’ont fait…

 

L’officier donne à boire au miraculé. Un infirmier fait bouillir de l’eau afin de débarrasser son horrible plaie de la crasse miraculeuse dont les Thôs l’ont ointe. Et la marche vers la Chine reprend ».

 

Bien plus tard, de retour en France, Fernand Cron reprendra son métier et terminera sa vie du côté de Cognac, où il était viticulteur.

 

 

 

 

 

Sources :

 

  • Encyclopédies Universalis, Larousse, Wikipédia.
  • Site de l’ANAI : Association Nationale des Anciens et des Amis de l’Indochine.
  • Bulletins de l’ANAI.
  • André Teulières, l’Indochine, guerre et paix, 1985.
  • Georges Fleury, La guerre en Indochine, Perrin, 2000.
  • Pierre Montagnon, La France coloniale, Pygmalion, 1990.
  • Jacques Dalloz, La guerre d’Indochine, Seuil, 1987.
  • Lucien Bodard, La guerre d’Indochine, Grasset, 1965.
  • Jean Sainteny, Indochine 1945-1947, Amiot-Dumont, 1953.

 

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Publié le 7 Janvier 2017

Jean de Saint-Victor de Saint-Blancard.

Jean de Saint-Victor de Saint-Blancard, membre du Souvenir Français de Rueil-Malmaison est-il un poisson ? Moniteur Fédéral 1er degré, moniteur Nitrox confirmé FFESSM, instructeur photographe Niveau 1 FFESSM, Jean est plongeur depuis plus de 43 ans.

Cela tient à un baptême de plongée dans la piscine de l’Université de Paris-Dauphine où il était étudiant en droit. Et depuis, pourrait-on dire, il n’en est pas sorti ! Ainsi, il effectue son service militaire « palmes aux pieds » en suivant une formation de plongeur à l’Ecole de Plongée de l’Armée de Terre, située à La Valbonne dans l’Ain. S’en suivra une formation pédagogique pour enseigner la plongée.

Par la suite, Jean travaille en tant que GO (Gentil Organisateur) dans différents clubs du Club Méditerranée, en Italie, au Mexique ou encore en Egypte. Bien entendu, sa spécialité : la plongée !

Puis il s’initie au monde du cinéma en réalisant des films 8 mm et des vidéos subaquatiques. Mais en 1996, c’est l’option photographie qui prend le dessus, grâce à une rencontre fondamentale avec un instructeur photo du nom de Robert Pakiela (aujourd’hui rédacteur en chef du magazine Aquamonde, journal du monde de l’image et du voyage subaquatique). Comme Jean l’indique : « Réaliser et analyser une photographie subaquatique, c’est reconnaître le travail du regard du photographe amateur, au sens latin de celui qui aime… C’est accepter l’idée que le plaisir d’une passion exige de ne pas faire les choses à moitié sinon c’est un peu tricher avec soi-même. Une photographie est semblable à un sentiment qui résiste à l’épreuve du temps. Aimer la mer, toutes ses beautés révélées par l’image, n’est-ce pas s’engager pour la protéger par un comportement responsable ? ».

Accompagné le plus souvent possible dans l’eau par son épouse, Marie, qui est également monitrice de plongée, Jean de Saint-Victor de Saint-Blancard participe à de nombreuses compétitions fédérales ou des concours de photographies subaquatiques. Il a ainsi été vice-champion de France à Nice en 2005, médaille de bronze à Aix-en-Provence quatre ans plus tard. Il a réalisé de nombreuses expositions que ce soit à Mandelieu La Napoule, à Rueil-Malmaison ou encore à Villeneuve-Loubet et est rédacteur d’articles pour la revue Plongée Octopus.

Jean est titulaire des décorations suivantes : chevalier dans l’ordre des Palmes académiques ; chevalier dans l’ordre du Mérite maritime ; médaille de bronze de la Jeunesse, des Sports et de l’Engagement associatif ; médaille de bronze pour Acte de courage et de dévouement et médaille d’argent de la FFESSM.

Enfin, Jean de Saint-Victor de Saint-Blancard est très attaché au Devoir de Mémoire. Que ce soit envers sa famille ou envers celle des plongeurs, comme Bob Maloubier, qui fut un grand Résistant, militaire hors-pair, membre de la Force 136 et fondateur des plongeurs de combat.

Membre du Souvenir Français depuis des années, donateur exceptionnel du Musée de la Mémoire Citoyenne de Mâcon, en Saône-et-Loire (dirigé par l’excellent Délégué général Jean-Claude Bernardet), il était normal que le siège de notre association remette à Jean la médaille du Souvenir Français. C’est chose faite depuis le mois de décembre dernier.

Félicitations cher Jean !

 

 

Frederic Rignault

Président du Comité d’Issy-Vanves

Délégué général adjoint des Hauts-de-Seine

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Publié le 3 Janvier 2017

Chatenay-Malabry : cérémonie à la mémoire des victimes coptes.

Le dimanche 11 décembre 2016, l’église copte Saint-Pierre et Saint-Paul, au Caire en Egypte, a été la cible d’un attentat revendiqué depuis par DAECH. 25 Egyptiens ont trouvé la mort dans cette odieuse attaque et 49 autres ont été blessés. L’église se trouve à côté de la cathédrale Saint-Marc, actuellement en rénovation. Trois jours de deuil national ont été décrétés par le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qui a condamné ce « lâche » attentat.

L'explosion a eu lieu pendant la messe, vers 10 heures. Elle se serait produite dans la partie féminine de l'église. Une charge de 12 kilos de TNT aurait été utilisée, selon une source policière. La bombe a explosé près d'un pilier, noirci et parsemé d'éclats. Des impacts étaient aussi visibles sur le sol de marbre. Les vitraux étaient presque tous brisés et les bancs de bois renversés pour la plupart, en particulier sur le côté droit de l'église.

 

La communauté copte de France a souhaité de suite adresser un message de compassion et d’amitié à ses frères d’Egypte. Aussi une célébration s’est déroulée le dimanche 18 décembre en l’église copte de Chatenay-Malabry, la principale église copte en France.

 

De nombreuses hautes personnalités civiles, militaires et religieuses (orthodoxes, catholiques, protestantes, juives, musulmanes) se sont retrouvées à l’occasion de cette célébration. Bien entendu, le Souvenir Français, tant le Comité de Chatenay, que la Délégation des Hauts-de-Seine et le siège à Paris, étaient invités et représentés.

 

N’oublions pas.

 

François-Marie Belin

Présidente du Comité de Chatenay-Malabry

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