Situé dans la Domaine de Villeneuve, ce mémorial a été construit entre 1926 et 1929, par l’architecte français Alexandre Marcel, à l’initiative d’un ancien pilote, Guerard Hamilton. Il bénéficia de l’appui des Autorités françaises ainsi que de nombreux donateurs américains, telles les familles Prince, Chapman, Vanderbilt et surtout William Cromwell, avocat américain installé à Paris, qui s’occupa du suivi et du financement des travaux.
Le monument est dédié à la mémoire et le sacrifice des aviateurs américains de l’Escadrille La Fayette. La crypte abrite les restes de 68 aviateurs, morts au combat pour aider la France à se sortir des griffes de l’Aigle allemand. Les noms sont repris et gravés sur le monument même.
Genèse
L'Escadrille La Fayette s'est constituée en 1916, par de jeunes américains présents en France, sur la base de trois principes : tout Américain qui se respecte connaît alors l'importance du rôle de la France et de son marquis au moment de l'Indépendance en 1776 ; un sentiment de solidarité entre les deux nations ; des appels et des manifestes qui paraissent dans toute la presse demandant aux étrangers résidant en France de s'engager dans l'Armée française (l'un des appels les plus célèbres étant celui de Blaise Cendrars, lui-même Légionnaire).
Pourquoi l’aviation ? Il faut bien penser qu’aux débuts de la Première Guerre mondiale, les avions portent une image de rêve, noble, chevaleresque, et que de jeunes américains, relativement aisés pour bon nombre d’entre eux, ne rêvent que d’exploits à raconter à la « mère-patrie ». D’autant que certains combattent depuis 1915 et que leurs prouesses sont portées aux nues dans les journaux d’outre-Atlantique.
La création de l'escadrille n'est pas simple : alors que les Etats-Unis ne sont pas en guerre contre l’Allemagne, comment prendre en compte des dizaines de soldats américains, et à commencer par leur inspirateur, Norman Prince, diplômé de Harvard et fils d’un industriel ayant de nombreux intérêts en France ? L'affaire est réglée par l'engagement de l'ensemble des pilotes dans la Légion Etrangère. L'escadrille s'installe à Luxeuil-les-Bains.
Premiers combats
La première mission de l’Escadrille La Fayette consiste à surveiller et protéger les bombardiers anglais stationnés à Luxeuil. A l’époque, un bombardier est un engin volant à 70 km/h au maximum, très lourd, très long au décollage, et dont l’armement de défense se résume à un mécanicien – placé derrière le pilote – équipé d’une carabine Winchester !
Pour autant, équipée de « bébés » Nieuport, des chasseurs bien armés et volant à près de 150 km/h, l’escadrille remporte sa première victoire : un biplace allemand armé de deux mitrailleuses est abattu. La fête qui s’ensuit reste dans la mémoire des aviateurs pendant des semaines… Il faut dire que le mess est sponsorisé par de riches donateurs, et que son chef est l’ancien saucier du Ritz de New York. Cette réputation fait très vite le tour de ce qui n’est pas encore une « armée de l’Air » : tout aviateur se trouvant dans les environs de Luxeuil, connaît, comme par hasard, une avarie. Il est, néanmoins, indispensable d'en passer par la tradition, et à ses risques et périls : caresser les crinières de Whisky et Soda, les deux lions mascottes de l’escadrille !
Outre Norman Prince, les premiers pilotes sont : Victor Chapman, Elliot Cowdin, Bert Hall, James Mac Connel, Kiffin Rockwell (auteur de cette première victoire), William Thaw (...). Ils sont placés sous le commandement d'un officier français, le capitaine Georges Thenault, secondé du lieutenant de Laage de Meux.
Verdun
Par la suite, l’Escadrille La Fayette est envoyée à Bar-le-Duc pour prendre part à la bataille de Verdun. Dès les premiers combats, trois pilotes sont tués ou grièvement blessés. Norman Prince meurt au retour d’une mission au-dessus de l’Allemagne. Puis ce sont les fronts de la Somme et de l’Aisne. Là encore, c’est une hécatombe ; bien que les pilotes soient équipés de Spad, plus maniables et plus performants que les Nieuport, les décès sont nombreux.
Le 16 août 1917, le général Pétain décerne à l'escadrille sa première citation à l'ordre de l'armée : "Escadrille composée de volontaires américains venus se battre pour la France, avec le plus pur esprit de sacrifice. A mené sans cesse sous le commandement du capitaine Thenault qui l'a formée, une lutte ardente contre nos ennemis. A soulevé l'admiration profonde des chefs qui l'ont eue sous leurs ordres et des escadrilles françaises qui, loin de l'affaiblir, exaltaient son moral, a abattu 28 avions ennemis homologués".
La fin
A la fin de l'année 1917, la majeure partie des pilotes de l'Escadrille La Fayette rejoint le Corps expéditionnaire américain ; dans sa forme originelle, l'unité cesse d'exister le 18 février 1918. Son insigne – une tête de Sioux – et ses traditions seront repris par l'Armée de l'Air française. Aujourd'hui, c'est l'escadron de chasse 2/4 La Fayette, stationné à Luxeuil, qui en à la charge.
En France, la célébration du Memorial Day (journée du Souvenir pour les Américains), se déroule notamment à Marne-la-Coquette. Les cérémonies sont l’occasion de se remémorer les liens d’amitiés et de confraternités d’armes qui unissent la France aux Etats-Unis d’Amérique, et de se rappeler qu’il y a un plus de quatre-vingt dix ans, de jeunes exaltés décidèrent, au péril de leur vie, de se battre en l’honneur d’un marquis qui avait engagé son nom et sa fortune en se mettant aux ordres de George Washington.
Retrouvez toutes les photographies de ces commémorations dans les albums appelés « Memorial Day ».
Le capitaine Thenault et son chien Fram devant un avion de type Spad.
Le capitaine Thenault entouré des premiers pilotes de l'Escadrille la Fayette.