De la Révolution iranienne à l’invasion du Koweit.
En février 1979, après plusieurs mois de manifestations et de répressions sanglantes, l’ayatollah Khomeini prend le pouvoir en Iran, mettant fin au règne du Shah d’Iran, Mohammad Reza Pahlavi. Bientôt il installe une République islamique. L’année suivante, ce gouvernement appelle ouvertement les Irakiens à renverser à leur tour leur dirigeant.
A la même époque, le général irakien Saddam Hussein, à la tête du parti Baas, annonce le départ d’Ahmad Hasan al-Bakr et devient le nouveau président de la République. Devant les menaces proférées par son puissant voisin perse, l’Irak décide d’attaquer l’Iran le 22 septembre 1980. Commence un conflit qui va durer près de huit ans, et va provoquer la mort de 600.000 à un million de soldats. Le tout pour des gains territoriaux minimes et sans qu’aucun des belligérants ne devienne la force politique et militaire majeure dans cette région du golfe persique.
Dix années plus tard, le régime irakien sort affaibli de cette guerre. Ses dettes sont considérables, et notamment à l’égard de son petit mais très riche voisin : l’Emirat du Koweït. Jeune Etat créé en 1961, avec l’appui de la puissance britannique, il est en outre accusé, de faire baisser le cours mondial du pétrole du fait de sa faramineuse production. Membre créateur l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole), l’Irak défend ses positions à maintes reprises au secrétariat de l’organisation à Vienne en Autriche. Il indique par ailleurs que le Koweït n’hésite pas à pomper de l’or noir dans des champs qui sont des propriétés irakiennes. Ce que l’autre partie récuse bien entendu. Peu à peu, l’Irak commence à désigner son voisin sous le terme de « 19ème province ». Il convient d’ajouter que le Koweït a une position géographique avantageuse avec une ouverture majeure sur le golfe persique, ce qui n’est pas le cas de l’Irak qui ne peut, de fait, multiplier les pipe-lines jusqu’à la mer.
Le 25 juillet 1990, Saddam Hussein rencontre l’ambassadeur américain à Bagdad et fait allusion à une possible intervention militaire. Les Etats-Unis, grâce à leur ensemble satellitaire, voient bien que l’Irak a amassé des troupes nombreuses près de la frontière du Koweït. Pour autant, le diplomate ne relève pas vraiment les dires du dirigeant irakien et laisse planer le doute sur une possible « remontrance » internationale. Aussi, le 2 août, les troupes irakiennes envahissent le Koweït. En quatre heures, la petite armée de l’émirat est anéantie. La famille régnante a tout juste le temps d’échapper à ses ennemis.
L’Organisation des Nations Unies condamne cette invasion immédiatement et exige le départ des Irakiens. Les Etats-Unis, présidés par George Bush (élu en 1988) décident de renforcer leurs positions militaires auprès de son allié, l’Arabie Saoudite. La base de Dharan reçoit en quelques semaines plusieurs dizaines de milliers de GI’s. Par ailleurs, les Etats-Unis ne voulant pas être seuls face à l’Irak, et paraître ainsi une nouvelle fois comme le « gendarme du monde », George Bush réussit, via le Conseil de Sécurité des Nations Unies, à confédérer une alliance d’une soixantaine de pays.
Au cours de l’automne 1990, alors que des pays comme la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, le Canada, pour ne citer que les principaux contingents, mais aussi des pays arabes comme l’Egypte, la Syrie, Oman les Emirats Arabes Unis, l’Egypte et bien entendu l’Arabie Saoudite montent l’opération « Bouclier du Désert », l’ONU fait voter plusieurs résolutions visant à infléchir la politique de l’Irak. La Turquie quant à elle masse près de 100.000 soldats à sa frontière avec l’Irak afin de prévenir tout « débordement » en territoire kurde. Saddam Hussein devient un héros dans certains pays ou auprès de populations comme les Palestiniens : il n’hésite pas à parler de guerre « arabe et sainte » contre les puissances occidentales et ses alliés. Pour donner corps à sa politique, il fait prendre des centaines d’européens en otage. Ce sont principalement des ouvriers et des ingénieurs de l’industrie pétrolière se trouvant là au moment de l’invasion du Koweït. Après plusieurs semaines, il finit par les faire relâcher.
L’opération « Bouclier du Désert » vise à recevoir et organiser l’ensemble des matériels et des soldats des pays coalisés. Elle commence le 6 août 1990, pratiquement au lendemain de l’invasion du Koweït, pour s’achever au début de la guerre proprement dite. C’est en effet le 16 janvier 1991, après d’ultimes demandes à l’Irak de se retirer, que des centaines d’avions de la coalition bombardent les positions ennemies. L’opération « Tempête du Désert » vient de commencer. Entre cette date et le mois de février 1991, plus d’un millier d’avions bombardent les positions irakiennes. A ce moment-là, les spécialistes estiment que l’ennemi a déjà perdu 20% de ses capacités. Ce qui ne l’empêche pas d’envoyer plusieurs missiles Scud sur Israël et sur l’Arabie Saoudite, faisant quelques dizaines de victimes.
Le 24 février 1991, les Américains déclenchent l’offensive terrestre. En quatre jours, les coalisés sont à Koweït City, capitale de l’Emirat. La ville est en ruine, les puits de pétrole sont en feu, mais Saddam Hussein fait annoncer que l’Irak se retire du pays, et accepte les résolutions de l’ONU, « sans conditions ».
La France, sous la présidence de François Mitterrand, a fait déployer le dispositif de « l’Opération Daguet » : 19.000 hommes, 15 navires, 60 avions, 120 hélicoptères et plusieurs centaines de chars légers et autres blindés.
Frédéric Rignault - Délégué général adjoint.
« Ma guerre du Golfe » par Jean-Dionis Singer.
Jean-Dionis Singer est électricien-frigoriste ; il est aussi porte drapeau du comité du Souvenir Français de Suresnes. Ancien engagé, il a participé à la guerre du Golfe en 1991 en tant que caporal au 3ème RIMA (régiment d’infanterie de marine).
La prise d’Al Salam.
« Les compagnies du 3ème RIMA, stationnées au quartier Foch-Délestraint, quittent Vannes puis Toulon en direction de Yanbu, port de la Mer Rouge – la cité du roi Calede – en Arabie Saoudite. Notre première mission, à Rafat, consiste à établir un camp pour recevoir les futurs prisonniers de guerre. A nos côtés, les Américains font leur propre camp. Les échanges sont fréquents, et ils nous apprennent des techniques à faire et à retenir vis-à-vis des prisonniers. Notre colonel, Bernard T…, veut son régiment au complet. Alors, nous laissons le camp avec déjà un prisonnier aux hommes de la 4ème compagnie du 2ème RIMA.
Quelques jours avant l’offensive terrestre, le 3ème est au complet. Direction l’Irak via une route baptisée Rochambeau. Nous sommes maintenant dans le désert irakien. La progression des VAB (Véhicule de l’Avant Blindé) se fait en ligne. Le 11ème RIMA est placé derrière nous. Avec ses canons de 155, ils nous offrent un feu d’artifice qui passe au-dessus de nos têtes. Le but étant de pilonner le terrain devant notre avancée.
La veille du combat, nous surplombons le fort d’Al Salam. Tous les marsouins ont les yeux et les armes braqués sur la ville et son fort. La nuit va être longue… Je suis dans mon VAB, les doigts sur les papillons de ma mitrailleuse 12,7. Brusquement, un coup d’œil sur ma droite : trois soldats irakiens, sortis de nulle part ! Les voilà au bout de mon canon. Il me suffirait de tirer et rien que le bruit les ferait coucher au sol. Mais ils avancent, les bras en l’air. Ils se rendent. Je donne l’alerte et je saute de mon véhicule, FAMAS (Fusil d’Assaut de la Manufacture d’Armes de Saint-Etienne) en main. Je m’approche d’eux et le leur ordonne de se mettre à terre. Ils n’offrent aucune résistance. Ils sont mouillés de la tête au pied. Je les palpe. Ils n’ont pas d’armes. Je glisse mes mains de leur poche et en sort du pain mouillé. Comme leurs camarades de combat, ils viennent de subir des journées entières de pilonnages de l’aviation alliée. Ils expliquent qu’ils se sont rendus pour ne plus subir cela. Pour rien au monde, je n’aurais à ce moment-là voulu être sous ces orages de bombes.
Le lendemain, c’est le Jour J. Nous entrons dans la ville. Pas une âme qui vive. La veille des hélicoptères ont largués des tracts pour dire à la population de quitter les lieux. Les maisons sont visitées une à une et les armes trouvées sont récupérées puis étalées sur la place principale. Des journalistes présents n’hésitent pas à dire qu’elles proviennent du Koweït. Sacrés médias ! La photo de ces armes fera la une des journaux…
Ensuite, le commandement nous demande de nous positionner à l’extérieur de la ville. Les pelles US remplacent dans nos mains les FAMAS que nous mettons en « chasseur alpin » (dans le dos). Nous organisons notre défense : trous de combat, sacs de sable, tours de garde… ».
Contrôler les nomades.
« Après la conquête d’Al Salam, la 4ème compagnie du 3ème RIMA (surnommée « les Scorpions »), se déploie dans le désert. Notre but consiste à contrôler les nomades. Ils voyagent dans des camions équipés de citernes d’eau, et au-dessus de laquelle tout le monde prend place : femmes, enfants, moutons, plus les matériels pour monter leur camp. Les contrôles se passent sans problèmes. Ils nous offrent même du pain (un pain en forme de galettes). Je me demande ce qu’ils peuvent bien penser de nous. Ils sont là, depuis des milliers d’années ; ils vivent dans leur désert et ne demande rien à personne. Et nous, nous venons les contrôler. Mais c’est la guerre. Les troupes de marine se trouvent partout dans le monde où l’on a besoin d’elles : que ce soit pour les conflits ou dans le cadre d’une coopération militaire. Soutien médical ou soutien logistique, les marsouins et les bigors sont là, le cœur sur la main.
Servir en Irak, j’imaginais plutôt un temps sec. Et là, je suis au milieu de tempêtes de sables et bien souvent il pleut, comme dans ma Bretagne. J’ai gardé en mémoire une aventure avec une toile de tente, de type canadienne, juste retenue par une corde. Elle volait comme un cerf-volant. Encore une nuit sous la pluie… Pour autant, tout se passait pour le mieux. Le caporal T…, de la compagnie de commandement et des services du 3ème RIMA, sonna le cessez-le-feu. La guerre était finie. Retour sur Yanbu puis départ vers Marseille. Nous embarquons sur le Danielle Casanova. Cela nous change des bateaux de la Marine nationale. Arrivée à Marseille puis direction Vannes. La population nous accueille les bras ouverts. Nous défilons dans la ville, devant la population reconnaissante.
Par Saint-Michel, vive les paras et au nom de Dieu, vive la coloniale !
Caporal Jean-Dionis Singer, du 3ème RIMA ».
Sources :
· Texte de Jean-Dionis Singer, ancien engagé au 3ème RIMA.
· Encyclopédie Wikipedia.
· Encyclopédie Larousse.
· Site sur les Opérations « Bouclier du Désert » puis « Tempête du désert » : http://guerredugolfe.free.fr/
· Vidéos sur la Guerre du Golfe : www.ina.fr ; www.youtube.com ;
· Témoignage du général Jacques Manet, ancien chef de corps du 6ème REG (journal Midi Libre, en date du 6 avril 2011.