Au 1er régiment d'infanterie.
Publié le 24 Février 2013
Une attaque du 1er RI en 1914.
A Sarrebourg.
Le mardi 13 novembre 2012, le lieutenant-colonel Patrice Fichet, président de l’ANORI et du Comité du Souvenir Français de Colombes, et le chef de bataillon Guy Peter, secrétaire général de l’ANORI, se sont rendus à Sarrebourg (Moselle) pour une visite au 1er régiment d’infanterie pour présenter l’ANORI et faire mieux connaissance avec ce régiment et sa Réserve.
Après un café d’accueil, le chef de bataillon Monatte, OSA, leur fit visiter l’exceptionnelle salle d’honneur du régiment, où sont retracés plus de cinq siècles d’histoire. Le 1er RI n’est pas en vain le plus vieux régiment d’Europe, issu des bandes de Picardie d’où il tire son Drapeau et de nombreux objets sont des témoins vivants de ce passé glorieux.
Le 1er RI présente la particularité d’avoir toujours gardé son numéro, qui atteste de son ancienneté – chaque régiment ayant été numéroté selon son rang, le premier étant le plus ancien – et de n’avoir jamais été dissous, même en 1942, où il prit le maquis avec armes et Drapeau, son colonel en tête. Il servit la France sous tous les régimes, monarchie, république et empire et participa à tous les combats.
Historique – Les Bandes de Picardie.
A la fin de la Guerre de Cent Ans, Charles VII crée les Francs Archers. C’est un échec. Le roi ne parvient pas à rassembler des troupes permanentes et entraînées. Imaginées par Louis XI en 1479, les bandes constituent la première armée permanente du royaume de France (simultanément à la naissance de l’Etat moderne centralisé). L’instruction des troupes est confiée aux mercenaires suisses, célèbres soldats de métier, et leur souvenir persistera longtemps dans les rangs de Picardie. Commandées par Philippe de Crèvecoeur, leur premier chef de corps, elles ont mission de tenir les provinces de Picardie et d’Artois. Elles arborent la bannière rouge, couleur de l’oriflamme de Saint-Denis, frappée de la croix blanche, symbole du commandement, et prennent l’appellation de « Bandes de Picardie ». Jusqu’en 1494, les bandes de Picardie composent la seule armée française.
Tout au long du 16ème siècle (sous les rois François 1er puis Henri II), les bandes de Picardie vont parcourir la France. Au moment des guerres de religion, ces bandes (il y en a maintenant également en Champagne et dans le Piémont) deviennent l’instrument des luttes des factions catholiques et protestantes. La création des régiments intervient dans ce contexte : le roi Charles IX a pour but de ramener les troupes dans la fidélité au pouvoir royal. Ces mêmes troupes qui combattent Henri III de Navarre, qui bientôt devient roi de France sous le nom d’Henri IV.
Pendant la Guerre de Trente-Ans, le régiment va se battre dans le nord et l’est du pays, sous les ordres du prince de Condé. L’unité s’appelle alors Régiment de Picardie. Il connait aussi d’autres campagnes qui le conduisent dans le Hanovre, en Bavière et dans le Piémont. Au cours de la campagne de 1734, au siège de Parme, alors que le régiment est durement exposé aux feux de l’ennemi, un autre régiment propose de prendre sa place en première ligne. Son chef, Monsieur de Rohan, fait alors cette célèbre réponse : « Vous me ferez mes compliments à votre colonel et vous le remercierez bien, mais vous lui direz qu’on ne relève jamais Picardie ! ». Cette phrase devient la devise de l’unité.
En 1780, Louis XVI rétablit la charge de colonel-général confiée au prince de Condé, qui commandait toute l’Armée française. Picardie, en sa qualité de premier corps de ligne, devient Régiment Colonel-Général dont il détient l’enseigne blanche. Pendant la Révolution, Picardie prend officiellement le nom de 1er régiment d’infanterie, puis de 1ère demi-brigade. Si le régiment échappe aux tourments de cette époque, il n’en est pas moins engagé à Valmy (1792) puis à Fleurus (1794).
Tout au long du 19ème siècle.
En 1800, le 1er régiment d’infanterie dit « de ligne » participe à la victoire de Biberach. Les Autrichiens se retranchent dans le village de Moesskirch et établissent une position favorable à la défensive. Les premiers assauts des troupes françaises sont alors repoussés. La 1ère Demi-brigade, jusqu’alors en réserve, est engagée. Malgré le feu nourri de l’adversaire, les soldats s’emparent de Krumbach et des hauteurs qui dominent le village à l’ouest et au nord. Bien que supérieurs en nombre, les Autrichiens cèdent du terrain après une journée de combat au cours de laquelle l’unité s’est faite remarquer entre toutes. Les heures suivantes se traduisent par de grandes victoires pour les héritiers de Picardie. Ainsi, à Wagram en 1809, ils se couvrent de gloire en enlevant les lignes autrichiennes dans un splendide assaut, baïonnette au canon. Mais, cette époque est aussi synonyme de jours plus sombres comme Waterloo. Malgré tout, les grenadiers de Picardie feront preuve ce jour-là du plus grand courage face à la mort.
Après avoir participé au maintien de l’ordre en Espagne au cours de la Restauration, puis à une campagne en Belgique, le 1er régiment d’infanterie de ligne est engagé dans la conquête de l’Algérie. Il s’y illustrera en particulier à la bataille de La Miliana (1842). Le 1er poursuivra ensuite ses expéditions en Crimée, en Italie et en Tunisie.
En juillet 1870, Napoléon III, empereur des Français, déclare la guerre à la Prusse. Le 1er RI est présent dans toutes les batailles de l’est de la France. Il sera notamment à Gravelotte où, au prix de très lourdes pertes, il ne cède pas un pouce de terrain face aux assauts furieux de l’ennemi. A Saint-Privat, pris de flanc, de face et à revers sur sa position de défense, il se maintient dans une tourmente de fer et de feu. Quand l’ordre de battre en retraite lui parvient, il a perdu 23 officiers et 489 sous-officiers et soldats. Reconstitué en 1871, le régiment rejoint Cambrai où il va tenir garnison pendant près de 70 ans.
La Grande Guerre.
En août 1914, la Première Guerre mondiale est déclarée. Le régiment est de tous les combats : en Argonne, à Verdun, au Chemin des Dames, dans la Somme, l’Aisne et la Marne. Il paye un lourd tribut en perdant plus de 3.300 hommes aux cours de furieux corps à corps livrés par ses Poilus. Ces pertes lui valent quatre citations à l’ordre de l’armée. Devenu définitivement 1er RI, il est décorée de la fourragère aux couleurs de la médaille militaire, le 19 octobre 1918 par le général de Castelnau. Pendant ce temps, la farouche bataille de Sarrebourg se déroule et c’est au cours de celle-ci que s’illustrent le colonel Touret et le colonel Rabier, chefs de corps des 95ème et 85ème RI. D’autres hommes de grande valeur comme le général Gérome, le lieutenant-colonel Malleray, les chefs d’escadron Cholesky et Dessirier participeront à ces combats. Le comte de Pelleport, engagé comme simple soldat à 59 ans dès les premiers jours du conflit, laissera sa vie lors de l’attaque sur Sarraltroff. Tous ces hommes donneront plus tard leur nom aux différents quartiers militaires de la ville.
Pendant la Seconde Guerre mondiale.
Une génération plus tard, la guerre reprend contre l’Allemagne. Le 1er RI se porte en Belgique où il supporte sans faillir le choc des divisions allemandes. Il contient l’ennemi à Gembloux. Puis, il couvre le mouvement de repli des forces françaises. Cela le conduira à Lille qu’il défendra jusqu’à l’épuisement complet de ses munitions. Au cours de cette période, le régiment garde malgré tout sa cohésion, en dépit de conditions très difficiles. Après l’armistice de juin 1940, le régiment s’installe à Saint-Amand-Montrond dans le Cher.
Lorsque la Zone libre est envahie par les Allemands (11 novembre 1942), le 1er RI, sous l’impulsion de son chef, le colonel Bertrand, passe au complet dans la clandestinité. Pendant trois ans, les hommes de Picardie participent à la lutte contre l’occupant, au sein de l’Organisation de la Résistance de l’Armée. Cette organisation est animée par son ancien chef de corps, le général Frère, qui mourra interné au camp du Struthof, à quelques kilomètres de Sarrebourg, dans les Vosges.
En dépit de la répression menée par l’occupant, des arrestations et des déportations, le régiment s’organise en créant le maquis du Berry. Il harcèlera l’ennemi et participera pleinement à la libération du pays. Au lendemain de la victoire, le régiment est stationné à Donaueschingen en Allemagne.
Algérie – Epoque contemporaine.
Le 1er RI rejoint l’Afrique du nord, de 1955 à 1961, où il intervient dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre à l’ouest de Sidi-Bel-Abbès.
Depuis 1968, il stationne à Sarrebourg. Après son retour d’Algérie, le 1er régiment d’infanterie sera successivement régiment d’infanterie de corps d’armée, puis régiment de combat aéromobile. Le 1er RI est professionnalisé dès 1985. C’est à ce titre qu’il va participer à toutes les opérations extérieures dans lesquelles ont été engagées les armées françaises. Sur le continent africain : Centrafrique, Côte d’Ivoire, Tchad. Au Moyen-Orient, il intervient notamment au moment de la Guerre du Golfe (1991). Il est au Cambodge puis dans les Balkans : Bosnie, Kosovo. Il contribue aussi à des missions de courte durée (MCD) : Guyane, Nouvelle-Calédonie, Mayotte.
Après une première mission au début du conflit en Afghanistan, en 2009 et pour laquelle le 1er se voit décoré de la Valeur militaire avec palme de bronze, le régiment est choisi pour expérimenter le premier, le matériel du programme FELIN (Fantassin à Equipements et Liaisons Intégrés), puis pour être à nouveau projeté en Afghanistan de novembre 2011 à juin 2012, une fois de plus en première ligne, pour la première utilisation du FELIN en opération et pour le début du retrait en intelligence avec l’Armée afghane, elle-même prenant le relais de la mission de pacification sur son territoire.
Aujourd’hui, le 1er RI est le régiment motorisé de la 1ère Brigade mécanisée.
Cet article est un extrait du bulletin de l’ANORI (Association Nationale de Réservistes de l’Infanterie) n°146 – 1er trimestre 2013. Les photographies sont issues du site Internet : www.wikipedia.org (historique du 1er RI).