Jean du Bos nait le 3 août 1890 à Neuilly-sur-Seine. Il est le jumeau de Madeleine et cadet de Charles du Bos qui, plus tard, connaitra une longue et belle carrière d’écrivain et de critique littéraire.
La famille est cosmopolite et issue de la grande bourgeoisie parisienne : le père de famille, Auguste Alexandre, a pour mère une Polonaise – Mademoiselle Laska – est diplomate et ami du roi Edouard VII. La mère, née Marie Mathilde Eustis Johnston vient d’une grande famille britannique (banque d’Angleterre). Elle est elle-même fille d’une ressortissante américaine et est née à la Nouvelle-Orléans, en Louisiane.
Entre 1911 et 1913, Jean du Bos effectue son service militaire au 94e régiment d’infanterie de Bar-le-Duc. L’année suivante, quand la Première Guerre mondiale éclate, le jeune homme rejoint son régiment. Caporal en janvier 1915, sergent deux mois plus tard, sergent-major dans la foulée, il est nommé au grade d’aspirant fin mai 1915, sous-lieutenant le mois suivant puis lieutenant en octobre 1915.
Un mois après le début du conflit, des éclats d’obus blessent Jean du Bos au bras et à la cuisse. En mai 1915, pris dans une intense fusillade, il permet le ravitaillement en cartouches et en explosifs de son régiment, qui se bat dans l’Argonne. On écrit de lui qu’il combat avec son revolver à l’avant-garde de ses hommes. Ses supérieurs louent son sang-froid, son coup d’œil et, c’est plus rare, sa bonne humeur.
A l’hiver 1915, il remarque en avant du front des traces de travaux allemands. Parti en observateur, sans se soucier des balles tirées autour de lui, il étudie le terrain avec ses jumelles jusqu’à ce qu’un projectile le touche en pleine face. La balle traverse le nez : Jean du Bos rejoint l’arrière. Revenu au front au printemps 1916, dans la Somme, il est tué devant Rancourt le 25 septembre 1916.
Ce village avait une importance stratégique. Occupé par l’armée allemande dès août 1914, il est au cœur de la bataille de la Somme qui commence en juillet 1916. La ligne de front est proche du village, traversé par une route qui constituait, pour les Allemands, un axe de communication indispensable à leur ravitaillement. C’est pour reprendre cette route qu’au cours d’affrontements particulièrement violents, un millier d’hommes meurent aux côtés du lieutenant Jean Du Bos.
Voici un extrait de l’historique du 94e régiment d’infanterie : « Du 2I au 24, le régiment reste sur ses positions, qu'il renforce malgré un violent bombardement. Dans la nuit du 24 au 25, les dispositions sont prises pour l'attaque : le 1er bataillon (capitaine Rémy) a pour objectif les lisières nord de Rancourt, le 3e bataillon (commandant Wauthier) la lisière du bois de Saint-Pierre-Waast, le 2e (commandant Chivot) est en soutien. Mais dans la nuit, les Allemands ont renforcé l'occupation de la tranchée Jostow, intacte, encore protégée par un réseau de fils de fer ; cinq blockhaus de mitrailleuses sont encore existants. Le 25, sans hésitation, malgré un feu meurtrier de mitrailleuses faisant de la plaine un champ de mort, à 12h34 le régiment se précipite en avant. Mais l'attaque vient se briser sur le parapet même de la tranchée allemande. Le 2e bataillon tente en vain de se porter en avant : ses pertes sont aussi importantes. Le régiment venait de perdre 25 officiers et près de 1.000 hommes, tués ou hors de combat. Des compagnies, comme la 2e et la 11e, avaient tous leurs officiers tués. Avec son élan coutumier, le 94e était parti à l'attaque, mais n'avait pu enlever la position, tandis qu'à gauche la 84e brigade débordait Rancourt par le Nord ».
Le lieutenant du Bos était chevalier de la Légion d’honneur (16 décembre 1915) et croix de Guerre. Citation posthume : « Officier d'élite, entraîneur d'hommes, animé du bel esprit de sacrifice. Déjà citation trois fois à l'ordre et fait Chevalier de la Légion d'Honneur pour de brillants faits antérieurs. Mort glorieusement pour la France, le 25 septembre 1916, devant Rancourt, en entraînant ses hommes à l'attaque. »
La chapelle.
En 1917, la famille du soldat décide d’ériger une chapelle à l’endroit de sa mort en hommage à tous ses camarades tombés au champ d’honneur. Confié à l’architecte Pierre Paquet, la première pierre est posée le 25 septembre 1920 par l’évêque d’Amiens. La chapelle est inaugurée deux ans plus tard par le général Desticker, chef d’état-major du maréchal Foch, en présence de 10 000 personnes. Construite en pierre de taille, la chapelle est située devant la nécropole française, où reposent 8 566 soldats de la bataille de la Somme. Dans la mort comme au combat, Du Bos est à l’avant-garde de ses camarades. Non loin de là ont également été aménagés un petit cimetière militaire britannique, ainsi qu’un cimetière allemand qui abrite plus de 11 000 tombes. La chapelle de Rancourt est donc au cœur de toutes les nationalités qui ont pris part à la bataille de la Somme.
Pour financer le monument, une souscription publique est lancée ; les donateurs peuvent acheter un ex-voto ou un vitrail de la nef. L’opération est étendue aux Etats-Unis, d’où était originaire la mère du lieutenant. Malade, elle meurt avant l’inauguration de la chapelle.
Le tympan du portail d’entrée fait mention de la dédicace à tous les soldats français morts dans les batailles de Picardie pendant la Grande Guerre. Le porche en plein cintre évoque les voûtes des fermes de la région. Dans la nef, de nombreuses plaques de marbre portent les noms des soldats morts au champ d’honneur. Depuis 1937, Le Souvenir Français est propriétaire par donation de cette chapelle qui accueille 12 000 visiteurs par an.
Sources :
- Archives de la Délégation du 92 du Souvenir Français.
- Site national du Souvenir Français.
- Site Chtimiste sur les unités militaires de la Première Guerre mondiale.
- Memorial GenWeb : contributions d’Elisabeth de Montmarin, de Bernard Butet, de Bernard Legendre, de Guy Chaillaud, de Nathalie Cornet, de Daniel Fouquerel, de Patrick Penot, de Françoise Huguet, de Bernard Viallon et de Marcelle Witkowski.
- Historique du 94e RI, Imprimerie Collot, Bar-le-Duc, numérisé par Jean-Pierre Rocca.