Publié le 21 Octobre 2009

 

Patrie littéraire, puisque Voltaire, puis Chateaubriand y vécurent chacun plusieurs années, Chatenay-Malabry eut longtemps l’aspect d’un village paisible, non loin de Paris. En 1921, la population ne dépassait pas 2.500 habitants… Pour bondir à plus de 10.000 en 1946, et le seuil des 30.000 habitants étant franchi en 1975.

 

 

Ceci explique pourquoi la ville possède deux cimetières, « l’ancien » et le « nouveau », et que sur le mur de l’ancien figure juste une grande plaque commémorative de l’ensemble des Morts pour la France, depuis 1914 jusqu’à la guerre d’Algérie. A noter : une plaque tombale quelque peu particulière et mise en valeur. Il s’agit de celle d’Alexandre Jean Marie Delarrard : « Noble d’origine, ancien colonel d’Infanterie et officier au régiment des Gardes françaises, né à Paris le 9 août 1744, mort le 16 février 1812. Il fut bon, juste, compatissant, et d’une probité exemplaire. Il laisse une veuve inconsolable, d’honorables parens (sic) et des amis fidèles. Tous le pleurent et ne l’oublieront jamais ».

 

Quant au cimetière nouveau, il comporte un carré militaire de 14 tombes de soldats décédés au cours de la Seconde Guerre mondiale, refait récemment avec, entre autres, l’aide du comité local du Souvenir Français, présidé par Françoise-Marie Belin.

 

Retrouvez les photographies du carré militaire de Chatenay-Malabry dans l’album intitulé : « Carrés militaires ».

 

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Publié le 18 Octobre 2009

Au sein des Partisans français de Slovaquie.




 

Septembre 1944, les Français embarquent dans les 3 camions prêtés par une fabrique de bière de la ville de Martin. Les hommes portent l’uniforme de l’armée slovaque.

 

 

Septembre 1944 : Maurice nous informait avec une certaine fierté, qu’’il est devenu « Partisan Français sur le sol de Slovaquie ». Il ajoute : « Je sais bien également, surtout en pensant à toi ma petite maman chérie que vous allez être bien inquiet et dire : quelle idée a eu ce fou de Maurice d’aller s’exposer alors qu’il avait l’occasion d’attendre tranquillement la fin de la guerre qui maintenant ne saurait plus tarder ».

 

Il précise aussi : « Si je m’étais toujours trouvé en Allemagne, toute évasion aurait été certainement impossible mais ici, en Slovaquie, une occasion nous a été offerte de prendre la fuite et c’est pourquoi, avec 36 camarades, nous n’avons pas hésité à nous joindre aux Slovaques qui passaient à la dissidence ».

 

« De cette évasion, pas grand-chose à vous dire sinon qu’à part une certaine fatigue, tout s’est fort bien passé. Nous avons franchi les postes allemands par petits groupes ayant l’air d’inoffensifs promeneurs et c’est seulement dans la montagne que nous nous sommes regroupés et que, sous la conduite d’un parachutiste russe et de deux officiers de police slovaques, nous avons rejoint le gros des forces dissidentes. Depuis, évidemment après pas mal d’ordres et de contre-ordres et surtout grâce à notre force de caractère, nous avons réussi à rejoindre une compagnie de camarades français prisonniers évadés et placés sous le commandement d’un Capitaine Français ayant reçu du Général de Gaulle, l’ordre d’organiser la dissidence en Slovaquie. Depuis, nous avons également retrouvé 20 autres de nos camarades qui travaillaient avec nous et qui, prenant exemple sur nous, ont saisi la première occasion pour prendre la poudre d’escampette ».

 

« Au point de vue de notre activité ici, je ne peux pas vous dire grand-chose car pour nous ce n’est pas une guerre de position mais plutôt une série de coups de main poussés un jour à un endroit, un jour à un autre et toujours de même. Maintenant ce qui est intéressant pour nous c’est que très certainement bientôt, nous pourrons faire notre jonction avec les troupes Russes qui ont réussi à s’infiltrer jusqu’à nous ».

 

Une remarque de Maurice, indiquée en PS sur sa lettre du 23 septembre 1944 : « Quand nous avons quitté l’usine où nous travaillions, il était exactement 5 heures du soir, le 3 septembre 1944, soit exactement 5 ans, jour pour jour, heure pour heure, après notre première entrée en guerre ».

 

Alors que durant le deuxième semestre de 1945, rentraient dans leur famille, en France, les prisonniers, déportés, ouvriers STO, rescapés de cette maudite guerre. Notre famille, elle, restait toujours dans l’attente du retour de Maurice. Nous dûmes attendre le 14 septembre 1945 pour avoir des nouvelles. Une lettre signée du Capitaine de Lannurien, commandant le Groupe des Combattants Français en Tchécoslovaquie, informait mes parents en ces termes : « J’ai le douloureux devoir de vous apprendre que le Soldat Maurice Simon est tombé glorieusement au cours des combats livrés en Slovaquie contre les Allemands. Le 6 février 1945, au cours d’une mission dans les environs du village de Nemecka Lupca, il a été surpris par les Allemands et abattu. Son corps a été inhumé à Nemecka Lupca. Lors de mon récent voyage en Slovaquie, j’ai fait le nécessaire pour qu’une sépulture décente lui soit assurée ».

 

Le chagrin éprouvé par notre mère fut indescriptible et le resta jusqu’à son décès, 30 ans après. 30 ans de douleur. Jamais, elle ne se consola de la perte de ce fils de 26 ans et de n’avoir pu rapatrier son corps. Des camarades STO évadés de Dubnica pour se battre près des Slovaques envoyèrent quelques courriers :

 

Le 24 août 1945, René Cuilleron nous indiqua : « J’ai connu Maurice en janvier 1944 à l’usine où il travaillait. Il était mon régleur et toujours nous avons été ensemble à Pottendorf, à Prague, puis à Dubnica. Le 3 septembre 1944 nous sommes partis dans le maquis ensemble et nous avons rejoint la Compagnie Française vers le milieu de ce mois. Nous avons été affectés à la même Section. Lui était tireur au F.M. et moi, chargeur. Par la suite nous avons permuté. A tous les engagements nous étions ensemble. La dernière fois que j’ai vu Maurice, c’est au nord de Bukovec (entre Banska Bystrica et Brezno) le 31 octobre 1944. Alors que nous étions surpris par les Allemands, il sortait en courant de la baraque où nous avions couché et ensuite nous nous sommes perdus. Dans le courant de l’hiver, vers la mi-décembre, j’ai reçu un mot de lui m’apprenant qu’il était en vie et m’invitant à le rejoindre. Après le passage du front russe, j’ai appris cette triste nouvelle et j’ai eu l’occasion de voir entre les mains d’un nommé Hochet, le portefeuille et les montres, je crois de Maurice. Il y avait d’ailleurs dans son portefeuille une photo que je lui avais donnée et qui est signée CUI-CUI (c’est mon surnom). Si vous êtes en possession de ces objets, dites-moi si vous avez un chapelet que je lui avais donné ».

 

Le 16 septembre 1945, ce fut un mot de Maurice Perrin, séminariste, devenu prête par la suite dans les environs de Clermont Ferrand. Il précisait dans quelles conditions il avait connu et apprécié Maurice en ces termes : « J’ai été moi-même très touché en apprenant la mort de votre frère. Je le connaissais depuis longtemps si je puis parler ainsi. En effet j’ai fait sa connaissance à Vienne à la Flugmotor ou je travaillais dans la même équipe que lui vers le mois de septembre 1943 et depuis cette date, nous ne nous sommes pas quittés avec quelques autres d’ailleurs, tels que René Cuilleron, Lionel Gabillon. Nous étions ensemble à Pottendorf où notre usine a brûlé, à Prague, à Dubnica et c’est de là-bas que le 3 septembre 1944, toujours ensemble, nous avons pris le maquis. Il avait comme arme un fusil-mitrailleur avec René et après les combats nous nous retrouvions au cantonnement, où nous étions des frères. C’est vers le 2 novembre que je l’ai perdu de vue. Il resta en effet ce jour-là avec sa Section pour monter une cuisine roulante et depuis ce jour où nos souffrances commencèrent véritablement, car nous étions traqués de tous côtés, je ne l’ai plus revu… Ce qui est certain, c’est que vous pouvez être fière de lui car il est mort en faisant son devoir. Je ne sais pas si vous êtes chrétienne, je sais que lui ne l’était pas, mais il était droit, dévoué corps et âme à cette classe ouvrière dont il était et dont il souhaitait ardemment le bonheur et c’est pour cela que j’espère que Dieu lui donnera le bonheur de l’Autre Côté et à cette intention, je prie souvent pour lui ».

 

Le 9 octobre 1944, la lettre de Armand Hochet qui nous avait renvoyé quelques affaires ayant appartenu à Maurice, apportait les précisions suivantes à la suite de nos remerciements : « Le 28 octobre 1944 je me suis trouvé avec lui dans la montagne car depuis que nous avions perdu notre Compagnie, nous étions tous égarés. Alors, après quelques jours de recherches, nous avons trouvé votre frère ainsi que quelques camarades, nous étions 28 Français dans une cabane. Un matin, nous avons été surpris par une patrouille allemande. Nous avons réussi à nous dégager sans perte, mais là, nous nous sommes égarés et c’est là que je suis resté avec votre frère et 4 autres camarades et nous avons erré tous les six pendant 2 jours dans la montagne, sans vivres et là, votre frère et un autre camarade du nom de Ginzbourg sont partis aux renseignements et nous ne les avons pas revus. C’était le 3 ou 4 novembre. Une quinzaine de jours après nous avons retrouvé leur trace sans réussir à les revoir ».

 

« Nous avons passé tout l’hiver sans avoir de leurs nouvelles. Le 2 avril 1945, nous sommes descendus de la montagne car l’Armée Roumaine nous avait libérés et nous avons été à Slovenska Lupca où nous avons appris la triste nouvelle qui était survenue à votre frère. Arrêté par les Allemands fin décembre ou début janvier, il a été emprisonné à Banska Bystrica et a été fusillé le 6 février seulement ».

 

 

 

Novembre 2008 – Juin 2009.



 


« A la gloire éternelle des fils de la France“.

 

Sur la colline de Zvonica près de Strecno, en Slovaquie, se dresse un monument du souvenir en forme d’obélisque dédié aux partisans Français morts aux combats lors du Soulèvement national slovaque (fin août 1944) : 24 partisans sont enterrés dans les cryptes sous le monument. Le nom de mon frère, Maurice SIMON, figure parmi les 56 Partisans Français !

 

Comment en sommes-nous arriver là ? Cette histoire remonte à la fin de l’année 2008. Ma sœur aînée Jeannine a l’occasion d’effectuer un voyage à Vienne, Bratislava et Budapest. Alors pourquoi ne pas en profiter et tenter d’en savoir plus. A force de recherches – car l’épopée des Français de Slovaquie est fort peu connue – nous apprenons que chaque année le gouvernement Slovaque procède à des cérémonies commémoratives notamment devant la stèle de Strečno lors de l’anniversaire de l’Insurrection de 1944. Le peuple slovaque est encore infiniment reconnaissant aux combattants français pour leur participation héroïque lors des combats pour leur liberté.

 

L’idée nous vient de chercher dans nos archives familiales, de tout reprendre, classer, analyser et contacter d’éventuels survivants. Et là, le miracle ! René Cuilleron, la fameux « Cui-Cui » répond à notre attente ! Avec ses informations, sa connaissance, nos recherches, nous en venons à remettre en doute la version officielle du capitaine de Lannurien. Maurice a-t-il vraiment été abattu et à l’endroit indiqué ? Où peut donc bien se trouver sa tombe ?

 

René Cuilleron a l’idée de demander à son ami, d’origine slovaque, Milan Podolsky, d’écrire dans sa langue au maire actuel de Slovenska Lupca, Monsieur Peter Lakomcik. C’est ainsi qu’en janvier 2009, nous avons la grande satisfaction de recevoir la photo de la tombe de Maurice qui est entretenue depuis 64 ans par les habitants de Slovenska Lupca et une copie du Registre de la commune : « Au cours et après des combats qui se sont déroulés aux environs de Slovenska Lupca, il a été trouvé un corps sans vie (mort) à PRIBOJ, quartier de Slovenska Lupca. D’après les documents personnels en sa possession, trouvés sur son corps, on a constaté qu’il s’agissait d’un homme du nom de Maurice SIMON, né le 5.01.1919 à Paris, métier, employé mécanicien. Il a été atteint par plusieurs coups tirés dans sa tête ainsi que des coups sur la partie supérieure de son corps. La date de sa mort : 3 février 1945. Il était vêtu d’une tenue civile de couleur bleue, coiffé d’un béret, chaussé de chaussures militaires ».

 

J’en déduis que Maurice, qui est vraisemblablement sorti de la prison le 20 janvier comme relevé par l’historien Chnoupek dans le sinistre registre noir du pénitencier de Banska Bystrica, s’est probablement évadé du camion qui les conduisaient au four à chaux de Nemecka Lupca pour y être fusillés. Il a été abattu à l’occasion de cette évasion. Son corps a été trouvé à Priboj qui se situe à l’entrée de Slovenska Lupca, près des Usines BIOTIKA, le long de la rivière Hron.

 

Et à l’occasion de notre voyage en Slovaquie, j’ai acquis la certitude que les partisans, sortis de prison le 20 janvier 1945, étaient conduits pour être abattus au-dessus des fosses de Kermnicka, dans la banlieue de Banska Bystrica. Le directeur du musée du SNP à Banska Bystrica m’a indiqué que les fameux « fours à chaud » ne servirent en fait que durant la période du 5 au 12 janvier 1945.

 

Et c’est ainsi que Jeannine (ma sœur), Sabine (ma fille), Jeanne (ma petite-fille) et moi, nous nous sommes rendues du 29 mai au 2 juin 2009 en Slovaquie, afin de nous recueillir au nom de toute notre famille, sur la tombe de notre cher Maurice, en emportant avec nous le souvenir de nos parents et notre sœur Mimie.

 



 

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Publié le 18 Octobre 2009

 

Sur cette photographie, mon frère Maurice a emprunté la chéchia d’un tirailleur.

 

 

Réquisitionné pour le STO.

 

« Maurice Simon, mon frère, notre frère, je l’ai si peu connu... Je suis née en 1935 et lui en 1919. Je n’avais donc que quatre ans lors des bouleversements apportés par la déclaration de guerre à l’Allemagne nazie par la France et l’Angleterre. Maurice était chasseur alpin. Mobilisé en 1939, il effectua son service au 13ème BCA de Chambéry puis appartint au 153ème Régiment d’Infanterie alpine de Lyon.

 

Je ne sais pratiquement rien de sa guerre. Juste qu’on le vit partir en 1939, revenir pour quelques permissions cette année-là, puis repartir pour être démobilisé en 1942. Maurice était très fédérateur au niveau de notre famille, mère, père, frère et sœurs, nièce, tantes et oncles, cousins et cousines. Tous en ont toujours gardé le souvenir d’un garçon gentil, bienveillant, amusant, attentif au bonheur de tous.

 

En 1942, Hitler exigea de la France et de la Belgique le recrutement de travailleurs pour remplacer les ouvriers allemands envoyés sur les fronts de l’Est. Pétain et Laval se chargèrent avec enthousiasme de faire exécuter les ordres nazis, sans grand succès dans les premiers temps, faut-il le rappeler ! Lorsque Maurice fut démobilisé, il fallut bien trouver du travail, ce qui n’était pas facile. C’est Lucien Schmit, patron de notre sœur Mimie qui le fit embaucher à la Polymécanique (filiale de Motobécane). Il y était depuis trois mois quand, le 16 février 1943, une loi imposa le Service du Travail Obligatoire (STO) : tous les jeunes âgés de 20 ans pouvaient être envoyés de force pour travailler en Allemagne.

 

Maurice reçut son ordre de partir. Il est clair qu’il n’y allait pas de grand cœur, mais dans le même temps il se sentait des responsabilités vis-à-vis de sa famille et il voulait avant tout, éviter des soucis à notre mère. En effet, les familles des hommes qui n’obtempéraient pas étaient menacées de représailles. Il se résigna donc à partir pour l’autre côté du Rhin.

 

Triste départ. Maman en compagnie de ma sœur aînée Renée, souhaitèrent l’accompagner jusqu’à la Gare de l’Est comme elle l’avait fait précédemment pour notre autre frère Pierrot. Le sort s’acharna sur nous : ma mère ne put aller plus loin que la Porte de la Villette car un camion allemand l’accrocha et la renversa. Légèrement blessée, elle rata le train et ne revit jamais son fils.

 

Deux années au cours desquelles les restrictions furent notre lot quotidien. Et pourtant, notre mère se dévouait comme seule une mère peut le faire. Eté comme hiver, elle se levait à 1h00 du matin pour aller faire la queue dans les couloirs des commerçants afin d’être dans les premiers servis car il n’y en avait pas de la viande pour tout le monde.

Pour aider sa sœur qui avait tant de difficultés pour nourrir tout son monde, ma tante Marthe m’accueillit chez elle à Gorenflos, petit village de la Somme. Elle avait bon cœur mais était assez sévère et je la craignais. Son mari, mon oncle Eugène était très gentil et tous les deux aimaient beaucoup notre famille. Ah, je n’ai pas souffert de la faim à Gorenflos ! Ma tante mettait un point d’honneur à me renvoyer chez mes parents avec une bonne mine et quelques kilos en plus !

 

C’est ainsi que j’allai à l’école avec les enfants du village dans une classe unique et que j’appris à parler un « ch’ti picard » que je comprends toujours… Je vis aussi se construire dans le Parc du Château, une rampe de V1 destinée à détruire Londres. Le village avait été complètement investi par les militaires allemands. Les soldats dans des casernements et les officiers dans des fermes aux alentours. Avec toute la famille, nous écoutions la radio. Je me souviens du célèbre leitmotiv « collaborateur » de Jean-Hérold-Paquis sur Radio-Paris qui était « L’Angleterre comme Carthage sera détruite », ainsi que la réplique de Pierre Dac à l’encontre de cette radio : « Radio-Paris ment, Radio-Paris ment, Radio-Paris est aux Allemands ».

 

 

Lettres d’Autriche.
 

 

 

 

 

Photo retrouvée dans le portefeuille de Maurice (2ème en partant de la gauche) à Pottentorf. Photographie envoyée en 1945 par Armand Hochet, Partisan français de la Cie de Lannurien.

 

« Et la première lettre arriva ! Elle venait de Vienne et de Pierrot. Il semblait se satisfaire de son sort, étant passé garde-baraque. La nourriture n’était pas abondante mais bonne et propre selon ses termes. Puis, ce fut une lettre de Maurice, datée du 2 mars 1943 dans laquelle il racontait la pénibilité du voyage et son arrivée à Vienne après 10 heures de train, par Stuttgart et Munich, content de ne pas avoir été séparé de son copain de Pantin, Lucien Rayer, ouvrier lui aussi de la Polymécanique. Maurice n’avait pas réussi à se faire affecter à la Wiener Locomotiv comme Pierrot mais se consolait du fait d’être également à Vienne et de pourvoir le voir tous les dimanches.

 

 

Je n’ai pas retrouvé de traces de lettres entre les mois d’avril 1943 et février 1944. Une lettre du 3 février 1944 nous indiqua que l’usine F.O.W. se situait à Brunn-am-Gebirge dans la banlieue ouest à 15 km du centre de Vienne. Les ouvriers n’étaient plus autorisés à écrire que deux lettres par mois et qu’en conséquence ils utiliseraient davantage les cartes-lettres. Maurice semblait persuadé que nos misères touchaient à leur fin et il montrait toujours un certain enthousiasme, ne se plaignant jamais de ses conditions de travail et de nourriture, certainement pour rassurer notre mère.

 

En avril 1944, il nous apprit que son équipe déménageait pour s’installer dans le village de Pottendorf, situé à 25 km au sud-ouest de Brunn (30 kms au sud de Vienne). Ils ne perdraient pas au change, écrivait-il, car s’ils étaient 20.000 dans l’usine précédente là ils ne seraient pas plus de 200 ! Et il se consolait en pensant que le dimanche il pourrait toujours voir son ami Lucien Rahier et Pierrot.

 

Ce même mois Pierrot nous apprit dans une carte qu’il s’était blessé au pied. Il revint chez nous en convalescence pour deux mois. Les événements que tout le monde connaît se déroulèrent le 6 juin 1944. Nous profitâmes de ce retournement de situation, de cette libération, pour cacher Pierrot jusqu’à la victoire.

 

Nouvelle lettre de Maurice le 27 avril 1944 : « Est-ce que Jeannine travaille toujours ? Est-ce que Denise, Dédée et Nicole sont gentilles et ne vous font pas enrager ? Est-ce que Mimie lui a trouvé un gentil beau-frère ? Et toi, ma petite maman, es-tu maintenant complètement remise de ta bronchite ? J’espère bien que quand nous rentrerons, nous te trouverons aussi forte qu’avant, tout au moins en bonne santé et alors, là, sois tranquille, à nous tous, nous te ferons récupérer tes forces et aussi que tu n’auras plus aucun souci. »

 

Vinrent ensuite des lettres dans lesquelles il nous parlait des alertes et des bombardements. Ainsi, le mardi midi 30 mai, avec quelques copains, l’usine et les baraquements furent détruits mais, heureusement, sans faire de victimes parmi les Français. Maurice et un copain furent désignés pour établir la liste des affaires qu’il était nécessaire d’obtenir pour tous auprès de la Flugmotor et de la Délégation Française : « Ce n’est pas un mince travail que de s’occuper de tout cela, mais enfin, cela rend service aux copains et c’est le principal. »

 

L’usine fut ensuite transférée à Prague en Tchécoslovaquie d’où Maurice nous écrivit les cartes-lettres datées des 28 juin et 10 juillet 1944 : « Tu sais, ma petite maman, depuis le 27 novembre 1939 que je suis parti presque continuellement de la maison, je commence à savoir me débrouiller et pour le peu qu’il me reste à faire, j’arriverai bien à m’en tirer » Et toujours il nous recommandait de garder Pierrot près de nous et de ne pas le laisser repartir.

 

Le 21 juillet 1944, après un nouveau déménagement, les Allemands les installèrent à Dubnica nad Váhom, au nord de Trenčín à l’ouest de la Slovaquie. C’est le site actuel des Usines SKODA. Là, Maurice décrivit leurs conditions de travail qui étaient très dures mais aussi, l’abondance de la nourriture, cigarettes et alcools.



 

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Publié le 17 Octobre 2009


Le samedi 17 octobre 2009 s'est déroulé le congrès départemental du Souvenir Français des Hauts-de-Seine, sous la direction d'André Labour, Délégué général.

Après avoir été accueilli par Olivier Maurion, président du comité de Sèvres, Monsieur Jean-Jacques Guillet, député de la 8ème circonscription des Hauts-de-Seine, maire de Chaville, puis François Kosciusko-Morizet, vice-président du conseil général et maire de Sèvres, ont prononcé des allocutions, insistant sur la nécessité du Devoir de Mémoire.

Chacun des comités a pu parler des activités au cours de l'année écoulée. Le colonel Pierre de Keraudren, secrétaire général adjoint national, a clôturé la séance de travail, en rappelant les directives du siège de notre association, puis a remis des médailles :

- Monsieur Monnin, de Courbevoie, médaille de bronze.
- Monsieur Pocholle, de Bourg la Reine, médaille d'argent.
- Madame Zajac, de Suresnes, médaille de vermeil.
- Madame Pasquet,  de Garches, médaille de bronze.
- Monsieur Brandela, de Fontenay aux Roses, médaille d'argent.
- Madame Tellier, de Bourg la Reine, médaille de vermeil.

Les participants se sont ensuite rendus d'abord devant la stèle des militaires tués au cours de la libération de la ville en 1944 puis au cimetière de Sèvres pour des dépôts de gerbes et un lâcher de colombes.

La Délégation générale des Hauts-de-Seine félicite et remercie toute l'équipe du comité de Sèvres pour la bonne organisation de l'ensemble de la journée. Retrouvez les photographies de l'événement dans l'album intitulé : "2009-10-17, Sèvres".

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Publié le 12 Octobre 2009

 

Un Français libre.

 

 

André Mansat s’engage dans la Marine française en 1939. Il embarque à bord du cuirassé Courbet le 18 janvier 1940.

 

Après l’armistice demandé par le maréchal Pétain, le 17 juin 1940, André Mansat rejoint les Forces Françaises Libres (FFL) à Londres, le 1er juillet 1940. Il est alors affecté aux Forces Navales Françaises Libres (FNFL), chez les fusiliers marins, et à bord de l’aviso La Moqueuse, il va participer aux engagements pour la libération, d’abord des territoires de l’Empire colonial français puis de la métropole.

 

 

Les Forces Navales Françaises Libres.


 

 

 

Au début du mois de juin 1940, après le rembarquement à Dunkerque d’une partie de l’Armée française et du Corps Expéditionnaire Britannique, de nombreux bâtiments ont pu échapper à leur captation par l’Armée allemande et se réfugient dans les ports du sud de l’Angleterre ou dans ceux de notre Empire colonial. Mais, la Grande-Bretagne se montre relativement hésitante. La Marine française ne doit tomber en aucun cas dans des mains allemandes !

 

 

 

Le bombardement, par les Anglais, d’une partie de la flotte française dans le port de Mers-el-Kébir (Algérie), le 3 juillet 1940, ne favorise pas la mise sur pied de forces dignes de ce nom. Pour autant, l’amiral Muselier, nommé par le général de Gaulle, s’efforce de constituer un Etat-major et de réarmer plusieurs navires : les premiers bâtiments de cette nouvelle Marine française sont le cuirassé Courbet, les avisos Savorgnan-de-Brazza, Commandant-Duboc et Commandant-Dominé, les contre-torpilleurs Triomphant et Léopard, le torpilleur Melpomène, les sous-marins Rubis, Narval, puis Surcouf, Junon et Minerve.

 

L’amiral Muselier est aidé dans son œuvre par un lieutenant de vaisseau et un commandant qui deviendront de hautes figures de la Résistance et de la France Libre : Honoré d’Estienne d’Orves et Thierry d’Argenlieu.

 

Les FNFL participent à des missions de protection de bâtiments de ravitaillement, aussi bien dans l’océan Atlantique que dans la Manche. En septembre 1940, elles tentent, au large de Dakar, de rallier l’Afrique Occidentale Française. Mais c’est un échec cuisant.

 

Plus tard, un engagement naval fratricide se déroule au large du Gabon : le Bougainville, pour le régime de Vichy, combat le Savorgnan-de-Brazza pour les FNFL. Ce dernier sort vainqueur de l’engagement. Dès lors, la reconquête peut réellement commencer : ce sont les épopées de l’Afrique Equatoriale Française, puis d’Afrique du Nord, de Lybie, de Syrie et enfin le débarquement de Provence en 1944.

 

Le 1er bataillon de Fusiliers Marins.

 

 

Le 17 juillet 1940, à la demande de l’amiral Muselier, le 1er bataillon de Fusiliers marins est créé. André Mansat fait partie des soldats de cette unité, commandée par le lieutenant de vaisseau Détroyat. Ses premières missions sont en Afrique Equatoriale Française. Puis c’est la campagne de Syrie, au cours de laquelle Détroyat perd la vie.

 

 

Son successeur est le lieutenant de vaisseau Amyot d’Inville. L’unité est engagée en Lybie. Elle participe au glorieux fait d’armes de Bir-Hakeim. Les combats se poursuivent en Tunisie. Puis ce sont le débarquement en Sicile et la reconquête de l’Italie. Enfin, le bataillon, devenu 1er régiment de Fusiliers marins se distingue dans la campagne de France (en Provence, dans les Vosges et en Alsace). Il est dissous à la fin de la guerre.

 

 

Au service du général de Gaulle et du Souvenir Français.

 

 

 

André Mansat est démobilisé le 31 juillet 1945. Il reçoit, outre ses nombreuses décorations, un certificat de « très bonne conduite ». Remarqué par le général de Gaulle, André Mansat a l’insigne honneur d’entrer au sein de son cabinet privé.

 

 

 

Bien plus tard, au début des années 1980, à la demande du commandant Gabillard, de la Marine, par ailleurs secrétaire de la Région Ile-de-France et maire-adjoint de Boulogne-Billancourt, André Mansat créé le Comité du Souvenir Français de Puteaux. Il est aidé dans cette tâche par Monsieur Jean Mignot, maire-adjoint de la commune, en charges des anciens combattants. Le 25 juin 1982 est la date officielle de création du comité. Il laisse ensuite la place à Monsieur Léon Gary, qui continue l'oeuvre selon les mêmes principes et avec la même volonté.
 

Le dimanche 25 mars 2007, André Mansat disparaît, laissant un comité solide, présidé depuis 1999 par Madame Den Marais-Hayer, et agissant au quotidien de façon remarquable pour le Devoir de Mémoire.

 

André Mansat était titulaire des décorations suivantes :

 

  • – Chevallier de la Légion d'Honneur.
  • – Médaillé Militaire.
  • – Croix de Guerre deux citations.
  • – Médaille de la Résistance.
  • – Croix du Combattant Volontaire 39/45.
  • – Médaille Commémorative service volontaire dans la France Libre.
  • – Médaille commémorative 39/45 avec barrettes Manche – France – Afrique – Méditerranée – Libération.
  • – Croix du Combattant.
  • – Médaille du Combattant Volontaire de la Résistance.
  • – Médaille coloniale avec barrette Libye- Bir-Hakeim 1942.

 

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Publié le 10 Octobre 2009

 

 

Le carré militaire de Meudon est l’un des plus beaux et des mieux entretenus du département. Il est situé dans le cimetière de Trivaux. Et le voyage se mérite ! D’abord, il est nécessaire d’être en forme pour y parvenir : le cimetière est posé sur l’une des collines qui entourent Paris. Et le carré est au sommet du cimetière. Là-haut, tout là-haut, se trouve une colonnade qui coiffe et protège les lieux. Bâtie peu après le premier conflit mondial, elle invite au recueillement et à la paix. Le tout forme un ensemble d’une grande harmonie et est indéniablement romantique. Pour un peu, il suffirait de tendre l’oreille, et l’on entendrait le piano d’Erik Satie et Marcel Proust, lire quelques pages du Côté de chez Swann.

 

 

 

Le carré militaire comporte 116 tombes individuelles de morts pour la France de la Première Guerre mondiale et 46 tombes pour les conflits suivants. Au sein de ces carrés, quelques particularités sont à noter :

 

  • – Eugénie et Martial Roumilhac, morts tous les deux en 1943 et placés dans la même tombe.
  • – C’est aussi le cas d’Hélène Schumacher et de Claude Barthélémy.
  • – La tombe d’André Bazoge, mort pour la France en 1926 ; la plaque rappelant son nom porte ostensiblement les insignes de la Franc-maçonnerie.
  • – Une tombe est nommée « Famille Cassis ».

 

Des tombeaux individuels se trouvent également dans ce cimetière comme celui du général Léon Rodcevitch Plotnisky.

 

Sous la colonnade sont inscrits dans des stèles de marbre les noms de l’ensemble des natifs de Meudon morts pour la France au cours des derniers conflits. La ville de Meudon a également décidé de placer là plusieurs plaques commémoratives :

 

  • La ville de Meudon à la mémoire des combattants morts pour la France en Indochine (cette plaque a été offerte à la fois par le Souvenir Français et l’Union Nationale des Combattants).
  • La ville de Meudon à la mémoire des victimes de guerre en Afrique du Nord.
  • La ville de Meudon à la mémoire des Français d’outre-mer morts pour la France.

 

Retrouvez les photographies du carré militaire de Meudon dans l’album intitulé : « Carrés militaires ».

 

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Publié le 10 Octobre 2009

 

 

Le colonel Richard Marillier.

 

 

Richard Marillier a été Résistant, membre de la section Chabal au maquis du Vercors, capitaine d’une section au 494ème R.I. pendant la guerre d’Algérie, colonel honoraire de l’Armée de Terre. Richard Marillier a été très présent dans le monde du cyclisme : Directeur Technique National du cyclisme français de 1970 à 1981, Directeur Adjoint Délégué du Tour de France de 1981 à 1990, Président de la Ligue du Cyclisme Professionnel et membre du Comité Directeur de l’Union Cycliste Internationale de 1989 à 1992. Le colonel Richard Marillier est commandeur de la Légion d’honneur.

 

« J’ai fait la connaissance de Robert Eggs, en 1957, à Bir El Ater (sud-est constantinois). Il avait le grade de capitaine et commandait la compagnie portée du 4ème Régiment Etranger d’Infanterie. Il jouissait d’une réputation exceptionnelle. En 21 ans de Légion, il avait combattu de Narvik à l’Indochine en passant par la Syrie et la Lybie ou il avait été fait Compagnon de la Libération à Bir Hakeim alors qu’il était adjudant-chef !

 

Au cantonnement comme en opération, il était un spectacle à lui tout seul. Il ne faisait rien comme les autres, il ne s’exprimait pas comme les autres. Il était à la fois craint, détesté et admiré. A cette époque, le commandement rassemblait les unités de secteurs pour monter des opérations. A Bir El Ater, j’étais lieutenant et je commandais la 6ème compagnie de 2/44ème RI. Je me retrouvai « accolé » à la compagnie Eggs pendant un an et demi. C’est dire si j’ai des anecdotes en mémoire. En voici une parmi tant d’autres.

 

Ce jour-là, nous avions accroché une bande rebelle dans le djebel Foua. Très rapidement, les différentes unités avaient éclaté et des combats sporadiques se déroulaient aux quatre coins du djebel. Enfin d’après-midi, les derniers fellaghas étaient aux prises avec la compagnie Eggs et tentaient de sortir du dispositif. Je fus appelé à la rescousse et, avec une section, je réussis à colmater la brèche puis je cherchai à rejoindre le capitaine. Au fur et à mesure que j’avançais, et que je dépassais les légionnaires, je finis par arriver auprès du sergent-chef Campanella, porte fanion de la Compagnie Eggs. Il était assis, adossé contre un rocher et fumait une cigarette en souriant. Son pantalon froissé laissait apparaître un pansement compresse au niveau de la hanche.

 

-          La bonne blessure, mon lieutenant, 23 jours de convalo ! me dit-il.

 

Il me précisa que le capitaine se trouvait devant, comme d’habitude. Les rebelles continuaient de tirer et je m’accroupis derrière un rocher où se trouvait le radio Rychtick. Ce dernier me dit que le capitaine était de l’autre côté. En me baissant, je le vis. Il était debout sur un rocher, les jumelles à la main et je l’entendis distinctement crier aux tireurs d’en face :

 

-          Alors, messieurs les fellaghas ! Montrez vos sales gueules et rendez-vous ! Après, il sera trop tard.

 

Une volée de balles s’abattit sur son rocher sans le toucher. Il répéta son discours et obtint la même réponse. Alors, se tournant vers ses hommes, il entonna : « Légionnaires… A l’assaut ! » et il se mit à chanter « Combien sont tombés au hasard d’un clair matin ». Toute la compagnie reprit le célèbre chant. Incroyable ! Un quart d’heure après, le combat cessa, faute de combattants.

 

Le commandement décida que l’on resterait sur place pour la nuit, afin de fouiller le terrain le lendemain matin. Il faisait froid car nous étions à 1.300 mètres d’altitude. Eggs m’invita à dormir avec lui et son ordonnance Mayerhoffer nous confectionna une sorte de litière avec de l’alfa, entourée d’un muret de pierres sèches. Sa djellaba nous servit de couverture. Je n’arrivai pas à trouver la bonne position pour dormir. Il s’en rendit compte et bougonna :

 

-          Encore un peu tendre (prononcé à l’allemande, en appuyant sur le « dre »).

 

Il saisit sa musette remplie d’alfa qui lui servait d’oreiller et me la glissa sous la tête, puis ramassa une grosse pierre sèche pour la remplacer. Je ne savais pas s’il fallait le remercier. J’attendis cinq minutes et lui dis :

 

-          Mon capitaine, Bir Hakeim, c’est quand même autre chose ?

 

Il ne répondit pas. Il dormait à poings fermés.

 

Aujourd’hui, le commandant Robert Eggs, grand officier de la Légion d’Honneur est âgé de 93 ans. Il vit avec son épouse en Côte d’Or, très exactement à Ivry-en-Montagne. Il est Français officiellement depuis quelques semaines».
 

Bir El Ater 1957 – Le Capitaine Eggs à la tête de sa compagnie du 4ème REI. Le porte-fanion est le sergent-chef Campanella.



 

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Publié le 9 Octobre 2009

 

Bombardiers Glenn-Martin 167 de l’Armée de l’Air française.

 

 

 

 

 

Le général de brigade aérienne (2S) Jean-Claude ICHAC, président honoraire du Souvenir Français d’Issy-les-Moulineaux évoque pour nous une personnalité hors de commun, et très peu connue, même au sein de l’Armée de l’Air.

 

« Dans les années cinquante, flânant sur les quais de la Seine, j’ai trouvé chez un bouquiniste un livre un peu abîmé, édité chez Fasquelle en 1944, dont le titre énigmatique me frappa : « Disparus dans le ciel ».

 

Autre détail surprenant, l’auteur de ce livre de guerre était une femme. Si je viens aujourd’hui vous en parler, c’est d’une part qu’il y a malheureusement peu de chance que vous le trouviez, soixante-cinq ans après sa parution, et d’autre part parce que cette femme, infirmière-pilote à l’aube de la deuxième guerre mondiale, aurait bien mérité la médaille de vermeil avec bélière laurée de notre association, le Souvenir Français, et voici pourquoi :

 

Germaine L’Herbier-Montagnon. Un nom que sans doute peu d’entre vous connaissent. Et pourtant cette infirmière-pilote a représenté, entre 1940 et 1942, le seul espoir puis l’apaisement pour des centaines de familles. Fondatrice de la « Mission de Recherche des morts et disparus de l’Armée de l’Air », elle a parcouru, avec son équipe, en deux ans, plus de 70.000 kilomètres, retrouvant 290 avions français et 240 anglais abattus dans le ciel de France ou de Belgique entre le 10 mai et le 20 juin 1940. Grâce à elle, 431 aviateurs français ont été identifiés et ont reçu une sépulture digne de leur sacrifice, après avoir été arrachés aux débris de leur appareil ou retrouvés dans une tombe anonyme.

 

Dans les conditions éprouvantes et difficiles de la France occupée, faisant la synthèse des ordres d’opérations, des journaux de marche des unités, des indications souvent contradictoire des témoins, équipages en vol, troupes au sol ou habitants, elle a su grâce à des détails parfois infimes retrouver, puis identifier ces disparus. Mais sa connaissance des matériels était particulière, comme en témoigne l’anecdote qu’elle rapporte :

 

« Etant sur la base d’Aulnat, avec un pilote de mes amis, voyant décoller l’appareil de notre ministre de l’Air, je demandais innocemment :

 

-  Qu’est-ce que c’est que ce zinc ?

-  Comment ? Mais c’est un Glenn-martin, voyons. Et c’est vous qui demandez cela ? Vous qui avez identifié plus de cinq cents avions abattus !

-  Oui, mais moi je les connais surtout pulvérisés, brûlés, en pièces détachées… Les axes, les boulons, les cylindres, les entoilages de volets, les armatures brisées n’ont plus de secret pour moi. Mettez ensemble les débris d’un Bréguet, d’un Morane et d’un Glenn- Martin, je saurai trier ce qui appartient à chacun. Mais un Glenn-Martin volant dans le ciel, je n’en avais jamais vu… »

 

En effet, des Glenn-martin et des Curtiss, des Amiot et des Potez, des Dewoitine et des Morane, des Bloch et des Breguet, combien en avait-elle retrouvé et identifié, au fond des bois ou au milieu des champs ? Comme par exemple ce Bréguet 691 :

 

« Le Sous-lieutenant Georges Chemineau et le Sergent Claude Guichon, de la 54ème Escadre, avaient disparu le 16 mai 1940, sur Bréguet 691 n°20 dans la région de Montcornet. Des aviateurs, participant à la même mission, avaient vu l’appareil s’écraser en flammes, à droite d’une route qu’ils supposaient être la nationale 46. Mais, après bien des démarches, je ne trouvai effectivement que les tombes du  Sous-lieutenant Alfred Devalez, chef de bord, et du Sergent-chef radio Maurice Buisson, tués le 16 mai 1940, sur LéO 45 n°54, groupe 1/12, à Raillimont, aux confins de l’Aisne et des Ardennes. Je dus revenir bien souvent dans la région, avant de découvrir les tombes de l’équipage du Bréguet 691 n°20, écrasé contre un petit bois, à droite du I.C.14 (*) de Chaumont-Porcien à Rocquigny. »

 

Si par chance vous trouvez un jour ce livre, n’hésitez pas. Il vous en apprendra beaucoup sur les pages glorieuses de notre Armée de l’Air en 1940, et sur le magnifique travail de Germaine L’Herbier-Montagnon et de son équipe. Car, comme l’écrivait le Général Chambe dans sa préface : « C’est un livre dont on doit lire les pages debout. »

 

Merci, Madame. »

 

 

GBA (2S) Jean-Claude Ichac

 

 

 

 

 (*) I.C. : Chemin d’Intérêt Communal.                                                                   

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Publié le 4 Octobre 2009

 

Bordée par les forêts de Meudon et de Fausses-Reposes, Chaville est une commune de taille moyenne du sud du département des Hauts-de-Seine. Pendant très longtemps concentrée autour de sa voie principale, qui avait été réalisée pour relier Paris au château de Versailles, Chaville ne connaît son essor qu’avec l’arrivée du chemin de fer, dans le courant de la seconde moitié du 19ème siècle.

 

 

Ville de François Michel Le Tellier, marquis de Louvois, secrétaire d’Etat à la Guerre puis ministre de Louis XIV, Chaville a cette particularité de ne pas posséder de carré militaire en son cimetière. Par contre, le monument à la mémoire des Chavillois morts pour la France, est peu commun. Il présente un Poilu, mort, couché, surmonté du coq français, lui-même perché sur la pierre tombale, ouverte, du militaire.

 

Ce monument rappelle le souvenir de l’ensemble des morts de la commune ; que ce soit pendant les deux guerres mondiales, avec les victimes civiles, comme pour les guerres de décolonisation.

 

Bien entendu, plusieurs tombes individuelles ou familiales renferment les restes de jeunes chavillois morts pendant ces guerres, comme par exemple, Maurice Barraud, Eugène Roblin ou encore l’aviateur Henri Rebard.

 

Retrouvez les photographies du carré militaire de Chaville dans l’album intitulé : « Carrés militaires ».

 

 

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Publié le 3 Octobre 2009

 

Le Dupleix en flammes.

 

 

Un Résistant.

 

Jean Eugène Joseph Mascré nait à Sceaux le 4 juin 1898. Agent immobilier, il est arrêté en 1942 pour fait de résistance à l’Occupant allemand. Son procès se déroule le 12 novembre de la même année. Soit le lendemain de l’anniversaire de l’Armistice de Rethondes de 1918, mettant fin à la Première Guerre mondiale ; soit, le lendemain de l’invasion de la Zone Libre par les troupes allemandes en représailles à l’Opération Torch, nom donné au débarquement des Alliés en Afrique du Nord.

 

Il est exécuté le 27 novembre 1942, fusillé au Mont Valérien, sur la commune actuelle de Suresnes, dans les Hauts-de-Seine. Au même moment, en Méditerranée, se déroule un autre drame : une partie de la flotte française se saborde en rade de Toulon, dans le Var.

 

 

Mers-el-Kébir.

 

Pour appréhender Toulon, pour tenter de comprendre, peut-être, le comportement d’un certain nombre d’officiers de la Marine française le 27 novembre 1942, il convient de revenir sur l’affaire de Mers-el-Kébir. Le 3 juillet 1940, la Royal Navy se présente en ces lieux d’Algérie et intime l’ordre à l’amiral français Gensoul de remettre les navires de son pays à la disposition de l’Empire britannique, ou de se rendre en Martinique pour les désarmer. Une troisième solution consistant en un sabordage pur et simple.

 

Un mois plus tôt, la France a signé un armistice séparé avec l’Allemagne. C’est-à-dire que notre pays s’est délié de son Alliance anglaise. Le Premier ministre Winston Churchill n’a qu’une crainte : que les navires français tombent aux mains des Allemands. La Marine française temporise, demande un délai de réflexion. S’apercevant que des navires font des préparatifs, les Anglais n’hésitent que quelques instants et ouvrent le feu sur la flotte française. Ce jour-là, de nombreux navires de guerre sont coulés : tels les cuirassiers Provence et Bretagne, le Mogador ; le croiseur de bataille Dunkerque est sérieusement endommagé. Plus de 1.300 marins français disparaissent au cours de l’engagement. La Marine française n’a pas pu ou peu riposté : ancrée dans la rade de Mers-el-Kébir, elle ne peut faire mouvement.

 

A Londres, le général de Gaulle indique : «  [...] en vertu d’un engagement déshonorant, le gouvernement de Bordeaux avait consenti à livrer les navires à la discrétion de l’ennemi. Il n’y a pas le moindre doute qu’en principe et par nécessité l’ennemi les aurait employés soit contre l'Angleterre, soit contre notre propre Empire. Eh bien, je le dis sans ambages, il vaut mieux qu’ils aient été détruits.  »

 

 

Le sabordage de Toulon.

 

Un peu plus de deux années plus tard, une partie de la flotte française se trouve dans la rade de Toulon. Des navires qui ont réussi à échapper au massacre de Mers-el-Kébir y sont aussi, comme le croiseur de bataille Strasbourg. Les troupes allemandes ont pénétré en Zone Libre : la totalité du territoire national est donc occupé.

 

La convention de l’armistice de 1940 entre la France et l’Allemagne stipule que l’envahisseur s’interdit d’utiliser la marine du vaincu. Pour autant, des documents retrouvés depuis indiquent qu’Adolf Hitler avait bien l’intention de servir de la flotte française. Quoi qu’il en soit, légitimement, l’Angleterre demande à son alliée la France d’acheminer au plus vite dans des ports alliés les navires français, alors que les Allemands progressent vers la Provence.

 

L’amiral Darlan, qui a été ministre des Marines marchande et militaire dans le gouvernement du maréchal Pétain, et qui a tenté, en 1941, de relancer la politique de collaboration avec l’Allemagne nazie, se trouve en Afrique du Nord au moment de l’Opération Torch. Il change de camp, se déclare « Haut commissaire en Afrique du Nord » et donne l’ordre à la Marine française de Toulon de rallier les Alliés.

 

Dans le même temps, l’amiral Auphan, chef d’Etat-major des Forces maritimes puis secrétaire d’Etat à la Marine, donne les instructions suivantes aux amiraux Marquis et Laborde, commandants les bâtiments de la flotte présente à Toulon :

 

  • « 1 – S’opposer, sans effusion de sang, à l’entrée des troupes étrangères dans les établissements, bases aériennes, ouvrages de la Marine ».
  • 2 – S’opposer de même à l’entrée des troupes étrangères à bord des bâtiments de la flotte ; par des négociations locales, s’efforcer d’arriver à un accord.
  • 3 – En cas d’impossibilité, saborder les bâtiments ».

 

Dans la nuit du 26 au 27 novembre 1942, cette dernière disposition est mise en œuvre par les deux amiraux, l’arrivée des Allemands étant imminente. Il est indéniable que de nombreux bâtiments sont privés de carburant et d’autres ne sont plus en état de naviguer (certains, comme le Dunkerque, sont toujours détériorés à la suite de l’affaire de Mers-el-Kébir). Mais pour d’autres, la fuite est possible. Ce sera le cas des navires suivants :

 

  • – le Leonor Fresnel, le Casabianca et le Marsouin atteignent Alger ;
  • – le Glorieux atteint Oran ;
  • – l’ Iris à court de gas-oil stoppe sa fuite dans le port de Barcelone. Il y stationnera jusqu’à la fin de la guerre.

 

Mais près de la moitié de la Marine française s’est sabordée :

 

  • – 3 cuirassés, 
  • – 7 croiseurs, 
  • – 1 transport d’aviation,
  • – 15 contre-torpilleurs, 
  • – 13 torpilleurs, 
  • – 6 avisos, 
  • – 12 sous-marins, 
  • – 9 patrouilleurs, et dragueurs, 
  • – 19 bâtiments de servitude,
  • – 1 bâtiment-école,
  • – 28 remorqueurs, 
  • – 4 docks de levage.

 

Finalement, l’Etat français de Vichy ne permet pas aux Allemands d’obtenir la Marine française, mais les Alliés n’en profitent pas pour autant ; les Allemands peuvent considérer que ces navires n’ont pas été livrés à l’ennemi donc cela peut être aussi considéré comme une victoire ; les Alliés sont également satisfaits, au moins, de ne pas voir la Marine française œuvrer pour l’Allemagne. Les perdants de l’affaire sont plutôt les Français libres sont le commandement d’un certain général de Gaulle.

 

Après la guerre, la Haute Cour de justice condamne l’amiral Jean de Laborde à la peine capitale, pour collaboration active avec l’Allemagne nazie. La condamnation est commuée en emprisonnement à perpétuité. En juin 1947, l’amiral est gracié.

 

 

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