Les chars d'assaut de 14-18 : 3/4 - Le char Saint-Chamond.
Publié le 11 Novembre 2015
Le Saint-Chamond.
A l’origine, les sociétés Saint-Chamond et Schneider reçoivent, chacune, une commande de l’armée française de 400 exemplaires d’un même char. Au début de 1916, alors que leur prototype commun, le tracteur A, est en cours de finition dans un atelier de l’armée, le soldat Pierre Lescure conçoit le compartiment de combat, et le lieutenant Fouché fait rallonger la suspension pour améliorer le comportement en tout terrain. Le train de chenilles est directement inspiré par les tracteurs Caterpillar Holt, déjà utilisés par l’armée pour le halage des pièces d’artillerie lourde.
Cependant, l’ingénieur en chef de Schneider, Eugène Brillié, rejette ce premier prototype. Il choisit un nouveau dessin intégrant son invention, une queue permettant de franchir les tranchées, avec une longueur de caisse bien inférieure, rendant possible la création d’un véhicule plus léger.
La société Schneider refuse de partager l’invention brevetée de Brillié avec la société Saint-Chamond qui, de son côté, ne veut pas verser de royalties à Schneider. Dès lors, les deux compagnies travaillent sur deux véhicules très différents, bien que dérivant tous deux du tracteur A initial. La société SOMUA, filiale de Schneider, usine donc le char Schneider CA1, alors que Saint-Chamond présente au ministère de la Guerre un projet de char qui se veut plus compétitif, car mieux armé (un canon de 75 mm normal et quatre mitrailleuses Hotchkiss).
Saint-Chamond utilise les relations au ministère de la Guerre d’un des deux directeurs techniques, le colonel Emile Rimailho, un des deux co-inventeurs du fameux canon de 75 mm Modèle 1897, pour faire accepter les spécifications de leur propre projet. Notamment le ministère approuve le montage d’un canon de 75 mm normal, à tube long, sur le char Saint-Chamond. Le résultat de cette validation est de rendre le char Saint-Chamond plus long et plus lourd que le char Schneider, avec un compartiment de combat allongé, dépassant largement le train chenilles, tant à l’avant qu’à l’arrière. Le premier prototype du char Saint-Chamond est présenté à l’armée et approuvé en septembre 1916. Les premières sorties d’usine datent d’avril 1917.
Description.
Issu du tracteur A, le char Saint-Chamond est un véhicule imposant, plus grand et plus lourd que son rival, le char Schneider CA1. Il dépasse en effet le char Schneider de plus de deux mètres, et il est plus lourd d’environ huit tonnes.
Cependant, malgré son handicap de masse, il est capable d’une meilleure vitesse de pointe sur terrain plat, grâce à son moteur Panhard et Levassor, sans soupapes, plus puissant, et surtout grâce à l’utilisation d’une transmission électrique « Crochat-Colardeau ». Cette dernière, utilisée avant guerre sur les automotrices de chemin de fer, rend possible une conduite relativement souple et rapide sur terrain plat.
Malheureusement ces avantages techniques ne sont valables que sur route. Une fois engagé dans la boue des terrains constellés de trous d’obus, le long nez du Saint-Chamond a tendance à se ficher dans le moindre trou. Enfin, sur les premiers chars Saint-Chamond, les chenilles résistent mal à l’usure et les patins de chenilles donnent des pressions au sol excessives.
Le char Saint-Chamond est utilisé jusqu’en septembre 1918, soit deux mois avant l’armistice de 11 novembre. Il trouve son rôle le plus efficace pendant les mois d’été 1918, après la reprise de la guerre de mouvement, en tant que canon de 75 mm sur affût à chenilles, capable d’engager directement l’artillerie de campagne adverse. Il peut donc être considéré comme un précurseur, certes très imparfait, des canons d’assaut, utilisés pendant la Seconde Guerre mondiale.
Sources :
- Ce texte a été écrit dans sa version originale par Monsieur Jean-Pierre Fouché. Il a été repris pour partie.
- Ce texte a été l’un des supports d’une exposition présentée dans plusieurs villes en partenariat avec le Souvenir Français.
- Henri Ortholan, La guerre des chars : 1916-1918, Bernard Giovanangelis Editeur 2007.
- Arlette Estienne-Mondet, Le général J.B. Estienne – père des chars : des chenilles et des ailes, L’Harmattan, 2010.
- Alain Gougaud, L’aube de la gloire, les automitrailleuses et les chars français pendant la Grande guerre, Ocebur, 1987.
- LCL Malmassari, Les Chars de la Grande guerre, 14-18 Editions, 2009.
- Sites Internet : Chars français sur le net, hébergé chez OVH ; sites Internet du ministère de la Défense et du Service Historique de la Défense.
- Encyclopédies Wikipédia, Larousse.